vendredi 30 novembre 2018

Les féroces

Une ville fantôme habitée par des putes en bout de course et des criminels sadiques. Un désert hanté par des tueurs implacables et cruels. Le sang, la crasse, la violence et peut être, au bout, l’étincelle fugace d’une rédemption, aussi ténue que la flamme d’une allumette en plein vent. 
Jedidiah Ayres n’a pas son pareil pour dresser le portrait des damnés de la terre, celles et ceux dont personne ne veut plus au point de les cantonner dans une bourgade perdue dans le désert mexicain, un avant-goût de l’enfer auquel ils se destinent. Ce court roman laisse éclater un style percutant, des phrases écrites au scalpel pour une incroyable galerie de personnages. 
L’auteur dresse ses portraits et campe une atmosphère de fin du monde avec une maitrise de la langue qui laisse pantois, essoufflé et ravi. Car au-delà de sa brutalité, de sa sauvagerie au service d’une vengeance aussi vaine qu’implacable, l’auteur laisse éclater un style unique qui n’est pas sans rappeler la plume trempée dans le vitriol de Patrick Michael Smith. 
Les féroces creuse le sillon d’une littérature américaine âpre et désespérée qui transcende la crasse et la violence pour en tirer une certaine forme de beauté.

samedi 17 novembre 2018

Suspiria

On sort de Suspiria dans le même état de chamboulement émotionnel que du Mother ! de Darren Aronofsky, ce qui n'est pas peu dire. D’ailleurs la comparaison entre les deux films ne s’arrête pas là. 
Installation progressive d’une atmosphère anxiogène, montée en puissance jusqu’à un final apocalyptique, épilogue faussement apaisé, Mother ! et Suspiria constituent à coup sur les deux coups de boule cinématographique les plus marquants et clivants de ces deux dernières années. Car loin de s’atteler à un remake respectueux de l’original, Luca Guadagnino peint sa propre toile et remonte aux origines même du mythe des sorcières. 
Femmes libres, féministes avant l’heure, manipulatrices, les sorcières ont nourri depuis des siècles les histoires les plus cruelles, et c’est bien ce côté engagé contre un matriarcat d’autant plus terrible qu’il se double d’un régime totalitaire (voire à ce sujet le sort réservé à la femme du Dr. Josef Klemperer dévoilé à la toute fin du film) qu’explore le réalisateur. 
Dans un Berlin plongé dans les années de plombs et le terrorisme, une ville terne et grise où il pleut en permanence, débarque Susie Bannion, une jeune américaine élevée dans l’ombre d’une mère bigote, pour intégrer l’académie de danse Helena Markos. Ce que les murs de l’école recèlent dépassera de loin ses pires cauchemars, pourtant gratinés. 
En plus de deux heures trente, Luca Guadagnino installe une atmosphère vénéneuse par petites touches, comme un peintre impressionniste colleraient ses visions fugitives sur une toile en perpétuel mouvement. Oscillant entre passé et présent, onirisme et réalité, passant d’un personnage à l’autre sans perdre le spectateur en route, le réalisateur nous embarque dans un monde presque exclusivement féminin (mis à part le Dr. Josef Klemperer, témoin et moteur de l’avancée de l’action vivant dans le souvenir de sa défunte épouse, tous les autres hommes sont au mieux de piètres faires valoir, au pire de simples figurants) fait de folie et de faux semblants, de luttes de pouvoir et d’art, de sacrifice et d’abnégation. 
Suspiria nous offre au passage une composition remarquable de Dakota Johnson qui se métamorphose tout au long du film et explose dans les scènes de danse, ainsi que la scène de meurtre la plus longue, originale et éprouvante vue sur un écran depuis longtemps. 
Le film se termine là où Dario Argento n’a pas su éviter l’écueil du Grand Guignol dans Mother of Tears. Oscillant constamment entre terreur et ridicule (comme Aronofsky dans Mother ! une fois encore), Luca Guadagnino nous peint un final dantesque, un véritable sabbat qui conclut un film dont on ressort retourné, parfois agacé par quelques dialogues indigents mais au final subjugué par autant de culot dans ses partis pris esthétiques et narratifs. La véritable raison d’être du cinéma en quelque sorte.

samedi 27 octobre 2018

The Predator

Oublions le premier opus mythologique et fondateur, oublions sa suite urbaine et teigneuse, toute comparaison avec ses deux illustres prédécesseurs serait vaine et non avenue. Profitons juste de cette relecture que l’on attendait avec autant de crainte que d’impatience vu le niveau moyen des suites et reboots qui envahissent nos écrans depuis quelques années. 
Shane Black, déjà présent au casting de l’épisode original choisit pour cette nouvelle version une voie osée et périlleuse, celle de la comédie d’action. Et il relève le gant avec panache. 
Alors oui, le scénario ne s’embarrasse pas de vraisemblance (la scientifique manie les armes comme le plus aguerri des Marines), l’action prime sur le reste, quitte à emprunter des raccourcis parfois vertigineux, mais au final le plaisir ressenti à l’écran n’en est que plus intense. 
Fort d’une galerie de personnages aussi bien écrits qu’interprétés, d’un casting au cordeau servi par des dialogues qui font mouche à chaque répartie (et il y en a beaucoup !), The Predator aligne les scènes de bravoures comme un métronome. Pourtant, ce n’est pas dans l’action que l’on prend le plus de plaisir mais bien dans l’interaction de cette galerie de personnages bigger than life jouant une partition sans fausse note aucune. Soldats, enfants ou scientifiques, le réalisateur s’amuse avec les codes du genre pour mieux les détourner. 
Parsemé de moments gores du plus bel effet et de multiples trouvailles visuelles (le premier Predator apparait grâce au sang dégoulinant d’une victime coupée en deux), volontiers méchant (Olivia Munn qui s’écrase sur le sol en sautant du toit du bus), souvent drôle (le soldat atteint du syndrome de la Tourette), The Predator tutoie les films les plus funs de ces dernières années alors que le sujet ne s’y prêtait pas vraiment. Grace en soit rendu à un réalisateur respectueux d’une franchise parfois malmenée en citant les deux premiers opus à maintes reprises et en mettent en scène le fils de Gary Busey inoubliable dans Predator 2. 
A quelques semaines d’intervalle, The Predator est l’exact inverse du récent remake d’Halloween, comme quoi tout est affaire de talent.

jeudi 25 octobre 2018

Halloween

Au sein d’un système hollywoodien plus que jamais gouverné par un retour sur investissement rapide, la mise en œuvre de suites, remakes et autres reboots semble devenir un genre à part entière qui engendre de belles surprises (L’armée des morts, Piranhas, Vendredi 13, La colline a des yeux) ou de franches catastrophes comme cet Halloween d’un vide sidérant. 
Alors certes il y a de bonnes idées comme cette Laurie Strode traumatisée adepte du survivalisme, alors pourquoi ne pas l’exploiter à fond plutôt que de la réduire à une grand-mère vénère ayant raison contre tout le monde ? Car les poncifs de ce genre, le réalisateur semble prendre un malin plaisir à les enfiler comme des perles. 
Les adolescents sont tous plus abrutis les uns que les autres, les journalistes sont bien entendu irresponsables, quant aux médecins et aux policiers, ils remplissent le quota de victimes potentielles aux cotés de quelques jeunes fumeurs de joints le soir du 31 octobre. Difficile à avaler après 50 ans de slasher.
Passons encore que le script efface allégrement toutes les suites depuis l’épisode original, qu’il fasse les yeux doux aux mouvements féministes incontournables depuis quelques mois avec la subtilité d’un éléphant, on pourra difficilement supporter les partis pris d’un réalisateur remplissant avec la régularité d’un métronome son quota de meurtres dont la moitié se passent hors champs. Si le film nous réserve quelques plans gores du plus bel effet et des idées de mises en scènes bienvenues (Laurie Strode filmée dans la rue à la place même de Michael Myers 40 ans plus tôt), c’est bien peu comparé à l’indigence dont fait preuve David Gordon Green. 
La dernière demi-heure, entre fouille interminable de placards, bande son envahissante et combo fille, mère et grand-mère (enfin) unies contre le croquemitaine (coucou MeToo) est une torture pour tout fan de la franchise qui se respecte. Les personnages sont aussi mal écrits qu’interprétés, mis à part un Michael Myers imperturbable qui perd du coup son aura fantastique au sein de cet environnement peu crédible. 
Une résurrection de trop donc, surement pas la dernière mais de loin la plus dispensable.

The House that Jack Built

Ce grand fou de Lars von Trier n’en finit pas de jouer avec nos nerfs et les limites du bon goût qu’il franchit de plus en plus allégrement. Après l’amour sacrificiel, l’expiation dans la douleur du péché originel, la famille dysfonctionnelle comme allégorie de la fin du monde, la solitude et le mal de vivre camouflés derrière une sexualité pathologique, voilà qu’il s’attaque à la question de la place de l’artiste dans ce qui ressemble à son œuvre, sinon la plus personnelle, du moins la plus auto référentielle. 
Car oui, cet architecte raté incapable de construire sa propre maison qui se réfugie dans les meurtres en série pour exprimer sa créativité et libérer ses pulsions les moins avouables n’est autre que le réalisateur lui-même, frustré de ne pas accéder au statut d’artiste et cantonné à la surenchère pour exister. L’œuvre de Lars von Trier ne serait donc qu’un tas de cadavres putréfiés artistiquement agencés comme un simulacre de création ? Pas si simple. 
Car en dépit de messages frôlant la caricature (le tigre et l’agneau), de postures ouvertement provocatrices (misogynie assumée, fascination pour les figures de dictateurs), le réalisateur est trop malin, et doué, pour être cantonné à un gamin turbulent jouant avec le feu. S’il reprend une structure narrative familière (histoire chapitrée, inserts de stock shock, violence frontale), The House that Jack Built s’inscrit pourtant comme une expérience à part dans la filmographie du cinéaste. Mais n’est pas le cas de tous ses films ? 
Avec une méticulosité qui confine parfois au documentaire, Lars von Trier nous fait partager les errances et les angoisses d’un tueur rongé par les TOC et incapable de la moindre empathie pour ses semblables. La séquence du nettoyage de la deuxième scène de crime et la conclusion du film illustrent une gêne quasiment physique pour le spectateur, provoquée par la répétition des mêmes gestes ou par une bande son agressive (nous sommes tout de même dans le dernier cercle des Enfers…). 
Alors oui, une fois encore Lars von Trier nous interroge sur la véritable nature de l’art et l’essence même d’un artiste, tout en nous conviant à sa propre séance de psychanalyse sur grand écran. Dérangeant, parfois même difficilement supportable (la scène du pique-nique est insoutenable de froide cruauté), The House that Jack Built est une pierre de plus dans une maison qui, si elle ne figurera pas parmi les plus grands monuments du septième art, aura au moins le mérite de nous sortir d’une léthargie parfois confortable mais au final souvent stérile.

dimanche 23 septembre 2018

Climax

D’abord il y a des visages. Hommes et femmes, hétéros ou homos, blancs ou noirs, français ou allemand, ils sont tous venus passer une audition pour un spectacle de danse dont les répétitions se déroulent à huis clos dans un chalet enneigé. On devine que la plupart des danseurs ne sont pas des acteurs professionnels, pourtant tous irradient d’une sincérité rare dans leurs propos. 
Vient ensuite la danse, une chorégraphie sauvage, faussement improvisée, un maelstrom de corps virevoltant les uns avec les autres. Rarement une scène filmée en plan fixe aura dégagé autant d’énergie et de maitrise de l’espace. Ainsi s’achève la première partie de Climax et l’on se prend à rêver à la grenade dégoupillée que vient de nous balancer le réalisateur à la figure. La déflagration promettait d’être intense, la descente à la hauteur d’une ascension vers les sommets du cinéma hexagonal contemporain. Sauf que non. 
Fidèle à ses thèmes de prédilection, Gaspard Noé nous inflige quarante-cinq minutes d’une Star Academy version trash suivi d’un mauvais trip interminable agrémenté de plans inversés et de filtres rouge sang. Alors oui, l’expérience est sensitive, cela ne fait aucun doute, mais pour servir quoi ? Ne mélangez pas de LSD avec votre sangria sous peine de gâcher votre soirée ? 
La cohésion affichée en début d’audition par la troupe de jeunes danseurs se fissure rapidement devant les dissensions internes, les jalousies et les frustrations, pour au final exploser dans une débauche de violence expliquée, sinon excusée à demi-mots par l’emprise de la drogue. Torche humaine, avortement à coups de pieds dans le ventre, auto mutilation, Gaspard Noé s’en donne à cœur joie sans pour autant verser dans le genre horrifique proprement dit. 
Il nous a déjà prouvé qu’il savait choquer (Irréversible), nous faire partager les trips les plus bizarres sous l’emprise de substances illicites (Enter the Void), nous entrainer dans la vacuité la plus profonde (le détestable Love), il nous démontre à présent qu’il peut filmer dans l’urgence des scènes remarquables et mettre une énergie communicative au service d’un vide abyssal. Pas le vide fascinant que l’on contemple au pied de l’abime, celui beaucoup plus ennuyeux d’un mauvais trip interminable étiré sur une bonne demi-heure. 
La déception et la frustration d’une entreprise que l’on considérera au mieux comme un peu vaine est d’autant plus forte que le réalisateur fait preuve d’un savoir-faire en s’entourant d’une troupe d’acteurs impeccable (exception faite de la mère de famille au jeu parfaitement faux) et en nous servant une bande son exemplaire. Gaspard Noé entend bousculer le cinéma français, pari à moitié tenu, l’autre moitié étant d’un ennui plombant.

samedi 25 août 2018

Lukas

J’ai déjà dit tout le bien que je pensais de l’excellent Braqueurs réalisé par Julien Leclercq en 2016, alors quand une partie de l’équipe (Julien Leclercq, Kaaris, Sami Bouajila) revient avec un polar sombre porté par un Jean Claude Van Damme à contre-emploi, le projet ne pouvait que susciter un vif intérêt. Hélas, le résultat est bien éloigné du résultat escompté. 
Impressionné par la star qui occupe tous les plans, le réalisateur semble se cantonner à mettre en scène un Van Damme dont le jeu se résume à trois expressions. Si le belge adepte du grand écart avait montré avec Replicant de réels talents d’acteur, il se contente ici d’afficher un air de chien battu perdu dans une réflexion trop profonde pour se sentir concerné par ses scènes. 
Porté par des dialogues faiblards et des personnages taillés à la serpe, Lukas n’arrive jamais à se hisser plus haut qu’un modeste polar sur fond de tragédie familiale. C’est d’autant plus dommage que Julien Leclercq n’abandonne pas son ambition de renouveler le polar français, mais il reste ici trop occupé à casser l’image américaine de Van Damme pour apporter aux autres personnages la consistance voulue. On ne saurait trop lui conseiller de revenir à des projets plus modestes mais plus sincères pour illustrer un genre dont il reste l’un des plus fervents défenseurs.

dimanche 19 août 2018

La saga des Coughlin

L’histoire commence en 1917 avec Un pays à l’aube et passe en revue la condition de vie des immigrés en Amérique, l’épidémie de grippe, la guerre, les mouvements anarchistes, le crime organisé et le syndicalisme naissant au sein des forces de police, vus à travers le destin de la famille Coughlin au sein de laquelle le petit Joe n’est qu’une figure secondaire derrière ses frères. Le second tome de la trilogie, Ils vivent la nuit reprend le personnage de Joe et son ascension au sein de la pègre. Ce monde disparu clôt le triptyque en pleine Seconde Guerre Mondiale et balaie ainsi une bonne partie de l’histoire des États Unis de la première moitié du vingtième siècle. 
Avec ces trois romans, Dennis Lehane démontre un fois de plus l’étendue de son talent et cette manière si particulière d’associer des destins personnels avec l’histoire d’un pays en pleine mutation. Fidèle à sa ville de Boston et à son amour des personnages ordinaires aux destins hors normes, le romancier dépeint avec minutie et un sens du détail impressionnant l’ascension d’un truand irlandais au sein de la mafia américaine dominée par les grandes familles italiennes. 
Un pays à l’aube est de loin le roman le plus réussi de la saga des Coughlin. Fresque historique foisonnante et portrait unique d’une famille dysfonctionnelle, le livre nous entraine dans une épopée qui dépasse de loin le seul destin du clan Coughlin. Plus classique mais non moins prenant, Ils vivent la nuit suit la montée en puissance d’un gamin roublard amené à devenir l’une des figures majeures de la pègre américaine. Ce monde disparu enfin s’impose comme un très beau roman crépusculaire sur le destin de ces hommes d’honneur qui sacrifient leur vie sur l’autel de la réussite. Les dernières pages du roman hantent le lecteur longtemps après avoir refermé le livre. 
La saga des Coughlin fait partie de ces rares livres que l’on a hâte de relire un jour pour le simple plaisir de la maitrise de la narration et du souffle épique qui traverse une histoire transcendée par le talent de son narrateur.

jeudi 9 août 2018

My absolute darling

Résistance. C’est le premier mot qui vient à l’esprit lors de la lecture de ce roman. 
Résistance d’une jeune fille sous l’emprise toxique d’un père charismatique et abusif, résistance de ce père, Martin, tout aussi rebuté qu’effrayé par un monde extérieur qu’il rejette dans un élan survivaliste, résistance face à des pulsions contre nature, une dépréciation de soi et une nature dangereuse autant que nourricière, grand thème s’il en est de la littérature américaine. 
Pour son premier roman, Gabriel Tallent oppose en effet l’immensité d’une nature sauvage décrite avec une précision presque maniaque et le repli sur soi d’individus en marge d’une société qui leur est étrangère. 
Turtle se renferme sur son monde intérieur fabriqué de toute pièce par son père qui voit en elle la quintessence du sexe opposé, sa fille et sa femme, l’amante et la guerrière qui devra renaitre sur les cendres de l’ancien monde. 
My absolute darling est de ces romans qui se lisent avec les tripes, oscillant sur le fil ténu de sentiments interdits et imposant son rythme lent et ses personnages remarquables. Malgré une fin abrupte, l’auteur ose des ruptures de ton bienvenues avec les personnages de Brett et Jacob, des scènes d’une violence physique et psychologique rarement vues et campe avec Turtle une battante absolument inoubliable.

mercredi 8 août 2018

Mission Impossible - Fall Out

Un thème musical reconnaissable entre mille immortalisé par Lalo Schifrin, une star omniprésente devant et derrière l’écran contre balancé par le tournant opéré par Brad Bird en 2011 avec Protocole Fantôme et sa mise en avant du travail d’équipe, une série de réalisateurs prestigieux et des cascades toujours plus folles, la marque de fabrique de la saga Mission Impossible se résume à un cahier des charges scrupuleusement suivi depuis le premier opus mis en scène par Brian De Palma en 1996. 
Si elle a évolué d’un postulat d’espionnage et d’infiltration vers une machinerie tournée vers le côté spectaculaire des exploits d’Ethan Hunt, la série n’en demeure pas moins une valeur sure en termes d’action fun et de rebondissements. Ce dernier épisode ne fait pas exception à la règle et, malgré l’absence inexpliquée de Jeremy Renner, tous les personnages sont réunis pour une nouvelle mission dont on oubliera vite le scénario tortueux pour ne retenir que les séquences d’action une fois encore impressionnantes. 
Et c’est bien l’une des constantes, et des limites de cette série (le premier épisode mis à part) que d’imprimer dans la mémoire des spectateurs ses cacades plutôt que ses enjeux dramatiques. On attend avec impatience le tournant opéré par James Bond avec Casino Royale pour découvrir le coté plus sombre d’un Ethan Hunt pas encore disposé à passer le relais à un autre interprète. C’est toute la différence entre l’agent américain et l’espion anglais, celle de s’affranchir de son (ses) interprète(s) pour laisser libre cours à un personnage capable d’évoluer dans le temps. 
Sans véritable enjeu dramatique et en misant tout sur une surenchère de cascades, Mission Impossible court le risque de ressembler à un grand huit tournant à vide, condamné d’avance par sa propre vacuité. Nous n’en sommes pas encore là (quoique…) et gageons qu’un prochain réalisateur saura orienter Tom Cruise vers des cieux plus sombres mais autrement plus intéressants.

mardi 17 juillet 2018

Sicario - La guerre des cartels

Contrairement à Denis Villeneuve qui prenait le temps d’installer ses personnages et une intrigue centrée autour des cartels dans le premier Sicario, Stefano Sollima est un homme pressé. 
Pressé de dérouler une histoire aux multiples rebondissements, pressés d’aborder une multitude de thèmes aussi différents que la menace islamique, le business des passeurs à la frontière américano mexicaine, la politique étrangère agressive des Etats Unis. Et paradoxalement, il n’en traite aucun. 
Alors qu’il déroule des scènes d’action parfaitement chorégraphiées et mises en scène et qu’il peint une imagerie guerrière en phase avec le propos de son film, le réalisateur oublie en chemin ce qui est pourtant la colonne vertébrale du précédent opus, le scénario. 
Sicario La guerre des cartels ressemble à s’y méprendre à une série que l’on aurait condensée sur deux heures pour en tirer la substantifique moëlle, quitte à s’autoriser quelques raccourcis parfois malheureux. Alors qu’il bénéficie d’une scène d’introduction plutôt réussie plantant un contexte politique beaucoup plus large que le seul territoire des cartels mexicains, le film déroule ensuite une série de rebondissements pour finir par un sprint final et un épilogue qui laisse pas mal de questions en suspens. 
Techniquement très réussi et encadré par des interprètes chevronnés, Sicario 2 délaisse le caractère quasi mythologique du premier opus pour un film d’action perfusé aux séries les plus en vogues. Plus violent mais moins sombre que son prédécesseur, le film se veut également plus frontal malgré une vraie ambition formelle. 
Les personnages sont au service de l’action, soit l’exact inverse du film de Denis Villeneuve que l’on se prend à rêver aux manettes d’un troisième volet clairement annoncé.

samedi 7 juillet 2018

Les Indestructibles 2

Monstres et Compagnie, Le monde de Nemo, les plus grandes réussites du studio Pixar héritent parfois de suites nettement inférieures à leurs prestigieux modèles. C’est donc avec une attente teintée de crainte que l‘on accueille le deuxième opus de ce qui reste non seulement comme l’un des meilleurs Pixar, ce qui n’est pas peu dire, mais également l’une des représentations les plus réussies de super héros sur grand écran. Et là miracle, la magie opère une nouvelle fois. 
On pourrait disserter à loisir sur la fluidité de l’animation, de la profondeur et du travail de caractérisation des personnages, du découpage minutieux des scènes d’action (l’attaque du prologue et la confrontation entre bébé Jack et le raton laveur sont à cet égard des modèles du genre), de la réflexion sur le statut de super héros, le poids des images dans notre société, de la difficulté d’exister avec et malgré sa famille, les sujets abordés sont aussi nombreux que les points de vue. 
Puisant encore plus dans la mythologie des supers héros que le premier Indestructible, ce deuxième opus cite ouvertement Batman pour expliquer le traumatisme des Deavor, Spiderman dans la façon dont se déplace Elastigirl, quant au costume de l’Hypnotiseur, il pourrait sans problème sortir d’un album de Hellboy. Au travers de la famille Parr, Brad Bird aborde notamment la place de l’homme et de la femme dans une société dont les codes matriarcaux sont battus en brèche avec toutes les perturbations que cela peut occasionner. 
L’une des forces du film réside entre autres dans le soin apporté au contexte de l’histoire. Toute la galerie de super héros est parfaitement crédible et la plupart des personnages sont caractérisés en quelques secondes. On sent au-delà de l’histoire un vrai respect pour les thèmes abordés. Contrairement à la mode actuelle, les supers héros ne sont pas un cache misère prétexte à construire une histoire susceptible de plaire au plus grand nombre, mais un miroir de notre société, de notre famille et de nos préoccupations quotidiennes doublées d’une magnifique illustration de ce statu si particulier. 
Les Indestructibles 2 figure d’ores et déjà parmi les meilleurs films d’actions de l’année et c’est avec un plaisir intact que l’on retrouve Frozone, Edna Mode et tous les autres autour de cette famille si attachante dont le dernier rejeton constitue le principal moteur humoristique de l’histoire.

American Nightmare 4 : les origines

Au-delà d’une série B reposant sur un concept plus malin qu’il n’y parait (dans un futur proche, le gouvernement des États Unis accorde une immunité totale durant une nuit pour permettre aux citoyens d’évacuer leur agressivité et de diminuer ainsi le taux de criminalité le reste de l’année), The Purge déroule pendant trois épisodes inégaux mais intéressants par leur angle d’attaque (la cellule familiale, l’exploitation des pauvres par les riches, la manipulation politique et sociologique) une histoire aux multiples ramifications dans un contexte sociétal passionnant. 
Car au-delà d’une série un peu bourrine et savamment illustrée par les accoutrements des émeutiers, The Purge puise son concept dans l’histoire même des États Unis, celle d’une nation construite sur le droit à chacun de s’armer pour se défendre, de la libre circulation des armes, du capitalisme débridé et des inégalités de classes. 
Ce quatrième épisode entend donc nous expliquer l’origine de la première purge dans la lignée de l’émergence d’un nouveau parti politique, les Nouveaux Pères Fondateurs largement subventionnés par la NRA. C’est là l’idée la plus pertinente d’un film qui ne propose rien d’autre qu’un vague démarquage des précédents épisodes dont il pille les idées principales. 
La militante afro pour les droits civiques, le recours aux mercenaires, rien n’est vraiment nouveau, et surtout pas une caractérisation des personnages aussi grossière que caricaturale. Entre le politicien froid et arriviste et le dealer au grand cœur qui n’assume pas son statut de corrupteur d’une société déjà fragilisée par la détresse sociale, la noire grande gueule vague caution humoristique et l’héroïne militante, le film n’offre rien d’autre qu’une galerie de caricatures à peine digne d’une série Z. 
Mais là où les premiers opus assumaient la radicalité de leur propos et mettant en scène la violence exutoire d’une population redevenue sauvage, ce quatrième épisode élude même ce terrain-là puisque (SPOILER ALERT) ce sont des mercenaires au service du gouvernement qui commettent le plus grand nombre de crimes, et non plus une population à qui on vient d’enlever sa muselière (fin des SPOLIERS). 
Pas grand-chose à sauver donc chez cet American Nightmare quatrième du nom si ce n’est quelques scènes d’action suffisamment sauvages pour susciter un intérêt poli. C’est bien peu.

samedi 30 juin 2018

Sans un bruit

Le film de John Krasinski s’en sort plutôt pas mal au sein de cette nouvelle mode des films conceptuels (Get Out, Don’t breath, The Purge et consort) qui reposent sur une idée étirée sur un voir plusieurs longs métrages. 
Dans un monde récemment dévasté par une attaque massive de créatures réagissant au moindre bruit, une famille tente de survivre et de surmonter ses propres traumatismes. Présenté comme cela, Sans un bruit ne suscite pas vraiment un enthousiasme débordant, et pourtant. 
Evacuons d’emblée l’idée centrale du film reposant sur la naissance d’un bébé par définition braillard dans un monde où la principale règle de survie est le silence. Ne nous polarisons pas sur l’usage parfois un peu facile de jump scares portés par la musique opportune de Marco Beltrami, ni sur la succession de patchs scénaristiques (le clou, l’inondation de la cave) ou sur la découverte finale et quasi miraculeuse d’une riposte face aux envahisseurs belliqueux. Avec un esprit ouvert et une pré disposition à passer un bon moment, Sans un bruit remplit haut la main son cahier des charges de série B efficace et parfois même audacieuse. 
Loin de la hype un peu enflée d’un Get Out ou du recyclage sans âme d’un Don’t breath, le film s’ouvre sur un prologue assez traumatisant et s’offre le luxe de faire disparaitre des personnages importants (il faut dire qu’il n’y en a pas beaucoup à l’écran) pour servir une histoire certes linéaire mais pourvue d’une réflexion intéressante sur la cellule familiale. Le réalisateur n’hésite d’ailleurs pas à citer d’illustres références qui imprègnent des plans entiers du film. Le design insectoïde des créatures renvoie à celles de Starship Troopers tandis que le face à face entre l’une d’elle et Evelyn Abbott n’est pas sans rappeler la confrontation entre Helen Ripley et les Aliens. Difficile enfin de ne pas penser à la saga Resident Evil lorsque cette même Evelyn Abbott campée par une Emily Blunt combative et armée d’un fusil à pompe affronte le monstre dans une cave. 
Sans un bruit se termine sur une fin badass à souhait et suffisamment ouverte pour nous faire espérer une suite. Pas sûr que le concept soit déclinable à l’infini mais en l’état le boulot est fait et le film réussit à servir le genre horrifique sans recours à une pseudo caution morale.

lundi 25 juin 2018

Ceci est mon corps

Il y a du Jack Ketchum et du Bukowski dans ce court roman de Patrick Michael Finn. Un récit rude, âpre et douloureux comme peut l’être l’adolescence dont cette nuit d’horreur constitue une allégorie à fleur de peau. 
Il faut arriver au bout de ce texte cinglant comme un shot de bourbon pour comprendre la cohérence de la traduction française de A martyr for Suzy Kosasovich ainsi que la couverture épurée de cette nouvelle collection Equinox des Arènes. 
Car il est bien question de sacrifice et de religion, de chair, de sexe et d’alcool, de rite initiatique et de passage à l’âge adulte dans un milieu prolétaire n’offrant d’autres issues à une jeunesse désemparée que les bars interlopes, les églises poussiéreuses ou les usines qui les broient, au sens propre comme au figuré. 
Patrick Michael Finn nourrit son histoire de sueur, de sperme et de sang et concentre en quelques heures le destin de vies sacrifiées que rien ne pourra racheter, pas même l’innocence offerte en pâture à la misère physique et intellectuelle d’une jeunesse condamnée d’avance.

samedi 23 juin 2018

Une prière avant l'aube

Rarement un film aura autant été desservi par la rigueur avec laquelle il traite son sujet. 
Billy Moore est un jeune homme mutique et colérique, boxeur amateur et drogué, un personnage qui aurait toute sa place dans la filmographie de Gaspard Noé période Love et Enter the Void, la sexualité en moins. 
Arrêté par la police thaïlandaise pour possession d’arme et de stupéfiant, Billy va se retrouver plongé dans le quotidien éprouvant des prisons thaïlandaises. Confronté à la barrière de la langue et à une culture dont les codes lui échappent complètement, Billy se renferme sur lui-même et cherche une échappatoire à ce milieu sans pitié, qu’il trouvera dans la drogue puis la boxe. Et c’est bien là que le film se révèle à la fois parfaitement réussi et difficile à appréhender. 
Avec une économie de dialogues et une narration visuelle éprouvante dans la première moitié du film (mouvements rapides de caméra qui passe d’un personnage à l’autre, chaos des match de boxe et des bagarres retranscris par un montage cut souvent peu lisible), Jean-Stéphane Sauvaire retranscrit à merveille la tension permanente et la solitude du personnage, tellement bien que ce mutisme se transmet au spectateur qui pour le coup n’éprouve plus grand-chose pour les personnages présents à l’écran. Billy est seul, nous aussi et nous avons le plus grand mal à nous raccrocher à ce protagoniste dont les accès de violence sont les seules manifestations d’un quelconque sentiment. 
La seule étincelle d’humanité vient du personnage de Fame, troublant lady boy dont Billy tombe amoureux, et de ce très beau plan final qui renvoie l’acteur à son personnage par un renversant effet de miroir. 
Une prière avant l’aube constitue le témoignage sec et violent d’une descente aux enfers et d’une rédemption dans la douleur avec le parti pris d’une absence d’empathie assumé jusqu’au bout.

samedi 16 juin 2018

Hérédité

On ne choisit pas sa famille. 
La famille Graham se réunit autour du cercueil de la grand-mère dont l’aura ne cessera jamais de peser sur eux tout au long du film. 
Annie sa fille traine un héritage familial propre à conditionner n’importe qui en psychopathe en puissance. Son mari Steve tente tant bien que mal de préserver l’équilibre de la famille tandis que son fils Peter cherche dans la drogue une échappatoire à ce climat délétère. Charlie, la petite dernière affublée d’un visage difforme semble développer un lien particulier avec sa grand-mère décédée et son attitude suffirait à terroriser une armée de psychiatres. 
Pour son premier film, Ari Aster frappe fort et juste. Juste parce qu’il arrive à distiller une atmosphère vénéneuse et anxiogène par petites touches sans abuser des effets de jump scares ou des ficelles habituellement utilisées dans ce type de film. 
Sorcellerie, maison hantée, folie, on ne sait pas où se situer et c’est là l’une des grandes forces du film, de nous promener en terres inconnues en s’appuyant sur un environnement physique et psychologique éprouvant. 
Dès les premières images du film nous éprouvons ce malaise, cette impression d’une catastrophe imminente et inéluctable, sans savoir d’où viendra le danger. Petit à petit, en prenant son temps (le film dure plus de deux heures alors que la majorité des films de terreur tendent à condenser l’action sur une heure trente), le réalisateur instille son venin. Des mouvements de caméra amples, une musique anxiogène et des personnages qui s’enlisent petit à petit suffisent à nous amener progressivement vers un dénouement terrifiant. C’est peut-être dans la toute dernière partie du film où le réalisateur lâche un peu trop la bride à des scènes trop explicites que le film perd de sa puissance narrative, mais qu’importe, Ari Aster réussit à graver dans nos rétines des moments de pure terreur et une réflexion sur le poids de l’hérédité tout à fait captivante. 
La violence psychologique se mue en outrages physiques pour mieux incarner cette malédiction (le poids de nos histoires personnelles) que nous trainons tous de générations en générations. Parfois mis en péril par le jeu de plus en plus hystérique d’une Toni Colette constamment sur le fil du rasoir et par une fin trop explicative, Hérédité ne sombre jamais dans le ridicule malgré ses excès. 
On aurait aimé, à l’instar de modèles du genre comme Kill List, que la seconde partie du film exacerbe autant nos nerfs et notre intelligence que les cinquante premières minutes, mais il n’en reste pas moins qu’Hérédité se place d’ores et déjà parmi les grands films de frousse, un genre d’autant plus balisé qu’il devient difficile d’en renouveler les codes. Pari réussi haut la main, Hérédité fait partie de ces rares films que l’on rêve de revoir une deuxième fois pour en dénicher tous les indices cachés.

lundi 4 juin 2018

Le dernier arbre (Tim Gautreaux)

Le dernier arbre appartient à cette tradition littéraire typiquement américaine, celle de la domestication d’une nature par essence hostile, des fondations d’un pays alors en plein essor, poussée par un progrès technique encore balbutiant et les appétits de conquêtes d’hommes et de femmes livrés à eux même dans les bayous de Louisiane. 
Alors que les échos de la Première Guerre mondiale et son cortège d’atrocités raisonnent encore jusqu’au plus profond des marais, Tim Gautreaux dépeint avec une plume qui n’est pas sans rappeler celle de Donald Ray Pollock une Amérique en devenir, déjà rongée par la fièvre capitaliste, un territoire où la loi du plus fort s’impose par l’argent ou par les armes. 
Entre naturalisme et tragédie, l’auteur esquisse le portrait de ces pionniers engoncés dans leurs contradictions et leurs pulsions mortifères, un monde en mutation où surgit des moments de tendresse et d’humanité là où on s’y attend le moins. 
Une page se tourne alors que tombe le dernier arbre, les morts retournent au néant et les vivants s’échinent à panser leurs plaies et à vivre malgré tout. 
Le dernier arbre est un livre empreint d’odeurs de putréfaction et de fraternité, d’amour, de folie et de haine. Le livre d’une nation en devenir bâtie sur des rêves qui parfois se réalisent.

jeudi 10 mai 2018

Death Wish

1974, Michael Winner met en scène Un justicier dans la ville avec le monolithique Charles Bronson. Trois ans plus tôt, Don Siegel offrait à Clint Eastwood le rôle mythique mais néanmoins trouble de l’inspecteur Harry Callahan. Il souffle alors un vent réactionnaire sur l’Amérique pré Reagan et le cinéma d’action ouvre la voie aux Stallone, Chuck Norris et autres Schwarzenegger. Quarante ans plus tard, les choses ont changé. 
Il y a eu les tueries de masse, la prise de conscience du problème des armes à feu aux Etats Unis, une société américaine en plein questionnement sur sa place dans le monde, loin des yuppies arrogants des années 80. Le remake de Death Wish que nous propose Eli Roth n’en est que plus désolant. 
Eli Roth, réalisateur malin et opportuniste capable du meilleur avec des films d’horreur nerveux et gores (Cabin Fever, Hostel 1 et 2) ou des thrillers vénéneux (Knock Knock) comme du pire avec The Green Inferno, hommage poussif aux films de cannibales, et maintenant ce remake gênant d’un classique du vigilante movie. Car contrairement à une lignée souvent digne d’intérêt (Death sentence de James Wan et sa réflexion sur les conséquences de la violence, Harry Brown et sa lecture quasi sociale du thème de l’auto défense), ce Death Wish version 2018 ne propose rien, ou si peu. 
Reprenant à la virgule près la trame du film original et situant son action à Boston plutôt qu’à New York, Eli Roth réalise platement un film qui n’explore à aucun moment son propre sujet, si ce n’est par le biais d’une studio de radio amorçant un vague débat rapidement tué dans l’oeuf. Bourré d’invraisemblances (le blessé arrive avec un flingue dans la poche à l’hôpital, Jordan Kersey sort de son coma pimpante comme une rose), servi par un Bruce Willis en service minimum depuis… depuis quand déjà ? Et traversé par la trop rare Elisabeth Sue, Death Wish ne joue ni la carte du second degré, ni celle d’une violence débridée comme on pouvait l’espérer de la part du réalisateur d’Hostel.
Death Wish est l’exemple même du remake qui n’apporte rien de neuf, ne procure que de rares moments de plaisir et se plante complétement d’époque. Un accident de parcours dans la carrière du réalisateur ou un vrai tournant ? L’avenir nous le dira.

mercredi 2 mai 2018

Foxtrot

Lorsqu’un officier de l’armée israélienne vient frapper à votre porte de bon matin, c’est rarement pour vous annoncer une bonne nouvelle. C’est cette expérience traumatisante que vont traverser Michael et Dafna dont le fils ainé Yonatan effectue son service militaire dans un poste frontière perdu en plein désert. 
Quoi de plus violent en effet que la mort d’un enfant, prompte à réveiller les secrets les mieux enfouis et à mettre à jour les personnalités les plus refoulées ? Le réalisateur israélien Samuel Maoz fait preuve d’une véritable maitrise qui éclate lors de scènes en état de grâce. Yonatan racontant la dernière histoire avant d’aller dormir, la tragique bavure du checkpoint ou encore cette scène empreinte d’une douloureuse beauté lorsqu’un couple arabe attend sous la pluie, humilié, que les soldats daignent enfin les laisser passer. Mais que d’efforts pour en arriver là ! 
La première moitié du film oscille entre des longueurs éprouvantes et un maniérisme à peine supportable. Il faudra en effet attendre ces scènes magiques pour se raccrocher à l’idée du film qu’aurait pu être Foxtrot. Car outre les lieux communs (l’auto mutilation pour se sentir vivant), l’usage des effets de caméra à outrance (le plan filmé du plafond est astucieux la première fois, il devient embarrassant au bout de quatre ou cinq reprises), Samuel Maoz en rajoute des tonnes dans une direction d’acteurs que seul le charme magnétique de la formidable Sarah Adler parvient à contre carrer. 
On passera sur une fin ratée (le suicide aurait donné au film une dimension tellement plus tragique qu’un banal accident) pour ne retenir que ces quelques moments en apesanteur sauvant in extremis un film qui, une fois n’est pas coutume, souffre d’un excès de mise en scène.

samedi 21 avril 2018

Escobar

Loving Pablo. 
Il est étonnant de constater à quel point la tagline de l’affiche (Oubliez tout ce que vous croyez savoir) vient contredire le condensé de la vie de l’un des plus célèbres trafiquants de drogue colombiens. Car il est bien question ici d’une biographie express de Pablo escobar, de son ascension jusqu’à sa chute sans autre point de vue original que celui de sa maitresse, la journaliste Virginia Vallejo qui, faisant fi de tout cliché, « aime Pablo et déteste Escobar ». 
Que retenir de ce long métrage formaté comme une note de synthèse pour étudiant en histoire ? 
La performance de Javier Bardem dont le volume de la brioche varie d’un plan à l’autre, une Pénélope Cruz au final peu convaincante et décidément malmenée par les trafiquants de drogue depuis le Cartel de Ridley Scott qui, avec son atmosphère quasi fantastique, proposait une vision mille fois plus captivante de ce milieu aussi fascinant que dangereux.
Mise à part quelques plans intéressants (la vue aérienne de l’assassinat du rédacteur en chef) et quelques idées neuves (deux exécutions sadiques avec chien et tronçonneuse, l’école des sicarios), Fernando León de Aranoa ne propose aucune vision et encore moins de point de vue cinématographique. La comparaison avec la série Narcos n’en devient que plus douloureuse. On pourrait affirmer que le film est formaté pour la télévision si les exigences de qualité du petit écran ne rivalisaient pas de plus en plus avec ceux du septième art. 
Alors oui, on préférera suivre Narcos dans son salon plutôt que de plancher sur ce condensé d’histoire colombienne, loin d’être déplaisant pour les passionnés du genre (j’en fais partie), mais dépourvu de tout point de vue digne de ce nom.

samedi 31 mars 2018

Hostiles

L’Amérique n’en finit pas de contempler son histoire à travers le prisme du cinéma dont le western demeure à ce jour le mètre étalon pour parler de la naissance et des fondements d’une nation en devenir. 
A ce jeu-là Scott Cooper entend bien remettre les pendules à l’heure concernant la sanglante confrontation des indiens natifs et des colons lorgnant sur ces immensités à conquérir. 
Dès la première scène, le réalisateur donne le ton. L’Amérique telle que nous la connaissons aujourd’hui est le fruit d’une longue guerre de territoire, une succession de batailles rangées et de massacres pour défendre son bien ou s’accaparer celui du voisin, au cœur d’un pays aux lois encore balbutiantes. La seule autorité qui prévale est celle que nous confère l’arme pendue au mur de la salle à manger, le reste n’est qu’un rapport de force entre les forces en présence. 
Dès lors qu’il emprunte le chemin de l’homme modelé, voire broyé par la guerre, Hostiles tient toute ses promesses. A mi-chemin entre Apocalypse Now et Impitoyable, le film suit les pas de Joseph Blocker que l’on nous décrit comme un boucher, un salaud parmi tant d’autre qui voue une haine tenace aux indiens. Tout comme William Munny incarné par Clint Eastwood, Joseph Blocker est une légende adulée ou haïe selon le camp dans lequel on se trouve, un homme écrasé par la spirale de violence dont il n’a jamais pu se défaire. Christian Bale incarne à la perfection ce personnage ambigu au bord du gouffre, obligé par sa hiérarchie d’escorter un chef de guerre Cheyenne malade pour son dernier voyage. 
S’ensuit alors un périple porté par une photographie magnifique où l’ensemble des protagonistes vont affronter la liste quasi exhaustive des figures imposées du western : Comanches, trappeurs, meurtrier en fuite, propriétaires terriens. Alors que la troupe est peu à peu décimée, chaque personnage se révèle à lui-même, basculant dans la folie ou cherchant au contraire un sursaut de vie dans les bras de l’autre. Le film nous entraine doucement vers un final que l’on pressent depuis un moment quand soudain tout s’accélère. 
Alors que Joseph Blocker multiplie un peu trop rapidement les gestes amicaux envers le chef indien, (SPOILER) la dernière fusillade décime tous les personnages pour ne laisser en vie que l’homme, la femme et l’enfant. Le réalisateur recompose, peut-être même inconsciemment, la figure tutélaire de l’Amérique, à savoir la sacro-sainte famille, symbole de l’ordre retrouvé. Et l’image du petit fils indien de Yellow Hawk engoncé dans un costume cravate aux cotés de sa mère adoptive laisse un goût amer. Si Scott Cooper avait à cœur de réhabiliter le sort des indiens, l’élimination hâtive de tous les protagonistes et l’occidentalisation du petit garçon survivant tendent au contraire à la normaliser par une réhabilitation de son héros de guerre au final assez maladroite. (FIN DU SPOILER) 
Hostiles avait tout pour être un grand film, son dernier quart d’heure en fait un plaidoyer gênant pour la colonisation des terres indiennes.

mardi 27 mars 2018

La forme de l'eau

Et si pour ne fois la bête emballait la belle ? 
Fidèle à son amour immodéré pour les monstres en tous genres et marqué à jamais par l’Etrange créature du lac noir de Jacques Arnold sorti en 1954, Guillermo del Toro nous propose une nouvelle aventure fantastique ancrée dans une Amérique en pleine Guerre Froide. 
Au cœur d’un laboratoire secret, Elisa rencontre une créature fruit de toutes les convoitises dont elle parviendra à percevoir la part d’humanité. Un sujet classique traité avec la grâce et l’intelligence que l’on connait à Guillermo del Toro depuis ses premiers films. 
Porté par un casting remarquable, de la fragile Sally Hawkins à l’inquiétant Michael Shannon, La forme de l’eau joue plus que jamais sur la partition musicale d’Alexandre Desplat ainsi que sur une palette de couleurs où dominent le vert et le rouge. Le vert pour le milieu aquatique dans lequel baigne le film dès les premières images, et le rouge lorsque surgissent le sang et le désir sexuel (Elisa s’achète les chaussures rouges convoitées dès lors que sa relation avec l’Amphibien est consommée). 
S’il renoue avec ses thèmes de prédilection, dont un final proche de celui du Labyrinthe de Pan, le réalisateur fait ici preuve d’une maturité nouvelle en traitant le désir féminin et l’acte sexuel de manière frontale. Multipliant les symboles explicites (l’eau, l’œuf), alternant des plans oniriques empreint d’une poésie envoutante avec des explosions de violence, Guillermo del Toro signe un nouveau film important, un cri d’amour à la tolérance et au panthéon du fantastique où virevoltent les petites fées du Labyrinthe de Pan qui reste à ce jour son chef d’œuvre insurpassable.

samedi 10 février 2018

Jusqu'à la garde

Transformer une situation quotidienne, déjà bien flippante, en une trame de thriller qui tourne au film d’horreur dans son dernier quart d’heure (bonjour Shinning), voilà le propos du nouveau film de Xavier Legrand. 
L’histoire débute dans le bureau du juge et pose les bases de l’intrigue. Antoine et Miriam entament une procédure de divorce dont l’enjeu se révèle rapidement être la garde de leur plus jeune fils, Julien. Dès le commencement le réalisateur renforce le contraste entre les deux époux par un effet de champs - contre champs faisant apparaitre le corps déjà massif d’Antoine comme disproportionné par rapport au frêle physique de Miriam. 
Les relations sont tendues, il règne entre les deux protagonistes un mélange de peur, de ressentiment et de colère qui affleurent et menacent d’exploser à tout moment. La tension ira crescendo jusqu’à un final empruntant tous les codes du home invasion par le biais de la présence écrasante de Denis Ménochet. 
Tour à tour père éploré par l’absence de ses enfants, mari jaloux ou pénitent, l’acteur aux yeux de chien battu bâti comme un déménageur samoan n’est rien d’autre que l’ogre des contes de fées, le grand loup soufflant sur la maison des trois petits cochons pour les dévorer. 
Jusqu’à la garde doit beaucoup à cette confrontation entre ces deux interprètes magnifiques que sont Denis Ménochet et Léa Druker avec au milieu le jeune Thomas Gioria tétanisé par ce père qui menace de le dévorer à chaque instant. Xavier Legrand se concentre sur ses personnages et rien de plus. 
Le décor, la direction artistique, les effets de manche s’éclipsent pour laisser le champ libre à une direction d’acteurs au cordeau et malgré quelques plans un peu longs, chaque scène transpire une tension qui ne nous quittera pas jusqu’au dernier plan, cette porte qui se referme sur nous comme un couvercle sur une marmite qui n’a pas fini de bouillir.

samedi 3 février 2018

Sparring

La boxe comme métaphore de la vie. 
L’approche n’est pas nouvelle, le noble art ayant inspiré le cinéma depuis de nombreuses années, pour le meilleur et parfois pour le pire. Comment alors se faire une place dans le panthéon des films de boxe, entre Rocky, Raging Bull et Million Dollar Baby quand on signe son premier long métrage en France ? Avec une sincérité et une justesse de ton à toute épreuve. 
Et c’est bien ce qui définit le mieux Sparring, la justesse. Justesse d’un scénario au cordeau évitant tous les pièges du misérabilisme, justesse des dialogues, des personnages portés par une pléiade d’interprètes en parfaite osmose les uns avec les autres. Justesse enfin d’une réalisation à hauteur d’hommes, et de femmes, pour servir cette histoire, non pas de rédemption, mais de combats ordinaires menés sur le ring ou ailleurs. 
Habité par la fausse nonchalance d’un Mathieu Kassovitz rarement aussi bon que dans ce rôle d’un boxeur quarantenaire, Steve Landry est un prolétaire du ring, un combattant ayant plus de défaites que de victoires à son palmarès, un boxeur qui revient malgré les ko et les humiliations. Mari et père de famille, Steve rêve comme tout un chacun d’un avenir meilleur pour ses enfants. Au point d’accepter de jouer le sparring pour un champion en passe de disputer un match décisif pour les championnats d’Europe. 
Si la boxe joue un rôle central dans le film, Samuel Jouy décide pourtant dès le début de changer son point de vue. A quoi bon se frotter aux plus grands films de boxe alors que tout ou presque à déjà été montré en matière de combat ? Non, le vrai combat, Samuel Jouy va le traquer en dehors du ring, dans le quotidien de cette famille extraordinairement proche de nous, dans ses difficultés quotidiennes ou ses relations avec leurs enfants. Preuve en est l’incroyable impasse faite sur le match du champion à la fin du film. Le principal se trouve ailleurs, dans la combativité de Steve et cette détermination sans faille qui lui fera enfin frôler le boxeur qu’il aurait pu être. 
Sensible et pudique à la fois, le film acquiert une dimension d’autant plus universelle qu’une fois encore le réalisateur contextualise son histoire dans le milieu de la boxe sans pour autant se focaliser sur ce qui en temps normal constitue le point d’orgue de l’intrigue, à savoir le combat final. 
Alors que la professeure de piano de sa fille lui fait remarquer que la musique et la boxe sont deux choses bien différentes lorsque Steve lui demande si elle a le « truc » (Rocky aurait parlé de l’œil du tigre), le dernier plan du film vient contredire cette réflexion à l’emporte-pièce en assimilant chaque épreuve à un combat. Steve vient à deux reprises dans la chambre de ses enfants après ses matchs, et à deux reprises sa fille lui demande s’il a gagné. Sa première réponse (« presque ») résume à elle seule sa vie entière. Sa deuxième réponse muette éclaire cette même vie d’une lumière salvatrice.
Alors oui, Sparring fait la part belle aux perdants. Une victoire tient souvent à peu de choses et au final les deux adversaires ont sué sang et eau sur le même ring pendant leur combat. Tarek, le champion entrainé par Steve lui demande pourquoi il continue après trois ans sans une seule victoire. Sa réponse est sans appel. « Pour que des mecs comme toi puissent exister il faut aussi des mecs comme moi ». 
Sparring magnifie ces perdants qui, à défaut de talent ou de moyens, se battent jusqu’au bout pour garder la tête haute et faire briller le regard de leurs enfants. Sparring est un bien joli film.

samedi 27 janvier 2018

Memories of murder

Auréolé par sa réputation de film culte, Memories of murder est un film étrange, un hybride qui mélange les genres pour mieux brouiller le spectateur guère plus avancé que les principaux protagonistes dans cette affaire de meurtres toujours non résolue. 
L’histoire se déroule en 1986, dans la province de Gyunggi, en Corée du sud. Une succession de meurtres à caractères sexuels défraie la chronique et incite les autorités locales à faire appel à l’aide de Séoul pour démêler les nœuds de ce qui ressemble fort aux agissements d’un tueur en série. 
Bien que traversée par des images fortes de cadavres abandonnées en pleine nature et la menace constante pesant sur ce village rural, la première partie du film reste dominée par le comportement bouffon des policiers locaux, à mi-chemin entre burlesque et violence institutionnelle. Il faut alors accepter de se plier à l’humour coréen fait d’expressions outrées et de gesticulations clownesques porté par un Song Kang-Ho en roue libre. 
Ce n’est qu’avec l’arrivée du policier de Séoul interprété par Kim Sang-Kyung que le film emprunte la voie du thriller jusqu’à une fin ouverte et d’une noirceur saisissante. Si le bien ne triomphe pas toujours, le mal laisse des empreintes indélébiles que même le temps ne pourra effacer. Traversé de séquences saisissantes (les attaques du tueur, les séquences nocturnes sous la pluie), Memories of murder se veut aussi le témoin d’une époque où les brutalités policières étaient monnaies courantes en Corée du sud et les exercices d’évacuation quasi quotidiens. Le film peint également une société profondément misogyne où les femmes ont à peine le droit à la parole et sont cantonnées à laver les vêtements ou servir le café, quand elles ne se retrouvent pas à l’état de cadavres dans un fossé. 
On peut préférer la folie de J’ai rencontré le diable ou la fulgurance de The Chaser, toujours est-il que le cinéma coréen marqua d’une empreinte indélébile le genre policier pendant plus d’une décennie.

samedi 20 janvier 2018

Three billboards

Aux manettes de l’éminemment sympathique Bons baisers de Bruges, le réalisateur Martin McDonagh faisait déjà preuve d’un sens de l’humour pour le moins particulier avec sa galerie de personnages décalés à cheval entre provocation et mauvais goût assumé. 
Dix ans plus tard, le revoilà avec une histoire qui semble écrite par/pour les frères Cohen, épaulé par un casting prestigieux et des personnages en or massif. Un alignement des planètes pour le moins inespéré pour un film qui ne l’est pas moins. 
Loin de s’attacher à raconter une histoire linéaire, le réalisateur scénariste nous embarque dans une ballade en plein Missouri à la rencontre de protagonistes hauts en couleurs dont les destins vont se croiser, se télescoper pour le meilleur et souvent pour le pire. En effet, nous débarquons à Ebbing, Missouri alors que le drame a déjà eu lieu et le film se termine sans que la question principale sur laquelle repose le scénario ne trouve de réponse. Est-ce gênant pour autant ? Non, car l’enquête ne sera au final que le prétexte à une avalanche d’évènements en cascade tour à tour tragiques et comiques, doux amers et violents. 
Et c’est bien là la force principale du scénario de refuser tout manichéisme au profit de personnages qui ne cessent d’évoluer tout au long du film. Servi par des interprètes d’une rare justesse, Three billboards arrive à condenser l’essence même de tous les ingrédients d’un film réussi. Des rôles parfaitement écrits, des acteurs complètement investis dans leurs personnages, des situations invraisemblables avec ce sentiment que tout peut arriver à tout moment, sans oublier un sens de la réalisation et une photo d’une rare qualité. 
Notons pour l’anecdote une faute de raccord dans la scène où Jason Dixon, allongé sur le canapé, discute avec sa mère qui lui conseille d’importuner les amis de Mildred. Jason tient un sandwich à peine entamé à la main et après un plan de coupe sur sa mère on le voit avec une chips. Ceci dit, Three billboards regorge de scènes bluffantes comme l’incroyable passage à tabac de Red Welby en plan séquence ou la lecture des lettres du chef Bill Willoughby qui devrait tirer des larmes de crocodiles à plus d’un spectateur. 
Dans un paysage cinématographique souvent aseptisé et binaire où les bons et les méchants sont caractérisés dès les dix premières minutes, Three billboards fait figure d’exception, un condensé de cinéma et d’écriture d’une rare densité et une performance d’acteurs et d’actrices comme on en voit trop peu sur grand écran.