samedi 20 mars 2010

Bad Lieutenant - Escale à la Nouvelle Orléans

Bien qu’il s’en défende à longueur d’interview, le nouveau film de Werner Herzog n’est pas sans rappeler le chef d’œuvre noir d’Abel Ferrara.
Titre identique (merci les producteurs), personnage centrale du flic drogué, joueur et corrompu qui, au travers d’une enquête, s’achemine irrémédiablement vers une descente aux enfers en se confrontant à ses propres démons intérieurs. Ceci étant, la comparaison s’arrête là et le film d’Herzog possède une identité propre qui le démarque d’un simple remake.
Moins désespérément noir et marqué religieusement que le Bad Lieutenant de Ferrara, cette Escale à la Nouvelle Orléans oscille constamment entre des genres aussi diverses que difficilement conciliables. Mené par un Nicolas Cage tour à tour absent et exalté, le film évolue du polar à la comédie grinçante en passant par le trip hallucinatoire.
Loin du polar urbain, ce Bad Lieutenant exploite pleinement l’atmosphère moite de la Nouvelle Orléans propice aux pétages de plombs et à tous les excès. Werner Herzog est un habitué des acteurs en roue libre. Sa collaboration chaotique avec Klaus Kinski est restée dans toutes les mémoires et à donné lieu à des films fous. Aguirre, la colère de Dieu suivait le parcours d’un conquistador mégalomane qui, partant à la recherche de l’Eldorado, entrainait dans sa chute tous ceux qui l’entouraient. Le lieutenant Terence McDonagh ne voyage pas dans la jungle amazonienne mais dans un monde peuplé d’iguanes et d’âmes de gangsters morts qui se mettent à danser le hip hop. Un monde qu’il est le seul à percevoir, un univers parallèle crée par les drogues de plus en plus dures qu’il consomme.
Bad Lieutenant nous offre à ce titre une succession de scènes plus folles les unes que les autres, orchestrées par un Nicolas Cage qui se lâche sans jamais tomber dans le cabotinage. Qu’il menace un couple de vieilles dames ou qu’il rackette des jeunes à la sortie d’une boite de nuit, qu’il négocie avec des gangsters ou qu’il parle des chasses aux trésors de son enfance à sa copine, Nicolas Cage est aussi touchant qu’incontrôlable et trouve surement là l’un de ses meilleurs rôles depuis un petit moment. Il est entouré d’un casting irréprochable (Eva Mendes, Val Kilmer, Brad Dourif) qui contribuent à la folie ambiante qui baigne le film.
Loin des fioritures d’un Guy Ritchie, du pathos d’un Ferrara ou du maniérisme (souvent jouissif) d’un Tarantino, Werner Herzog réalise un film décalé, servi par des comédiens impeccables, distillant une atmosphère unique faite de chaleur moite et de délires hallucinogènes, d’alligators et d’iguanes, de gangsters hauts en couleurs et de flics plus ou moins véreux.
Les dialogues servent des situations surréalistes (« Tire encore ! Pourquoi ? Je vois son âme qui continue à danser ») et font de ce film une œuvre à part dans le paysage cinématographique actuel, mais finalement totalement cohérente dans la filmographie de ce réalisateur unique qu’est Werner Herzog.

Bad Lieutenant - Escale à la Nouvelle Orléans

Bien qu’il s’en défende à longueur d’interview, le nouveau film de Werner Herzog n’est pas sans rappeler le chef d’œuvre noir d’Abel Ferrara. Titre identique (merci les producteurs), personnage centrale du flic drogué, joueur et corrompu qui, au travers d’une enquête, s’achemine irrémédiablement vers une descente aux enfers en se confrontant à ses propres démons intérieurs. Ceci étant, la comparaison s’arrête là et le film d’Herzog possède une identité propre qui le démarque d’un simple remake. Moins désespérément noir et marqué religieusement que le Bad Lieutenant de Ferrara, cette Escale à la Nouvelle Orléans oscille constamment entre des genres aussi diverses que difficilement conciliables. Mené par un Nicolas Cage tour à tour absent et exalté, le film évolue du polar à la comédie grinçante en passant par le trip hallucinatoire. Loin du polar urbain, ce Bad Lieutenant exploite pleinement l’atmosphère moite de la Nouvelle Orléans propice aux pétages de plombs et à tous les excès. Werner Herzog est un habitué des acteurs en roue libre. Sa collaboration chaotique avec Klaus Kinski est restée dans toutes les mémoires et à donné lieu à des films fous. Aguirre, la colère de Dieu suivait le parcours d’un conquistador mégalomane qui, partant à la recherche de l’Eldorado, entrainait dans sa chute tous ceux qui l’entouraient. Le lieutenant Terence McDonagh ne voyage pas dans la jungle amazonienne mais dans un monde peuplé d’iguanes et d’âmes de gangsters morts qui se mettent à danser le hip hop. Un monde qu’il est le seul à percevoir, un univers parallèle crée par les drogues de plus en plus dures qu’il consomme. Bad Lieutenant nous offre à ce titre une succession de scènes plus folles les unes que les autres, orchestrées par un Nicolas Cage qui se lâche sans jamais tomber dans le cabotinage. Qu’il menace un couple de vieilles dames ou qu’il rackette des jeunes à la sortie d’une boite de nuit, qu’il négocie avec des gangsters ou qu’il parle des chasses aux trésors de son enfance à sa copine, Nicolas Cage est aussi touchant qu’incontrôlable et trouve surement là l’un de ses meilleurs rôles depuis un petit moment. Il est entouré d’un casting irréprochable (Eva Mendes, Val Kilmer, Brad Dourif) qui contribuent à la folie ambiante qui baigne le film. Loin des fioritures d’un Guy Ritchie, du pathos d’un Ferrara ou du maniérisme (souvent jouissif) d’un Tarantino, Werner Herzog réalise un film décalé, servi par des comédiens impeccables, distillant une atmosphère unique faite de chaleur moite et de délires hallucinogènes, d’alligators et d’iguanes, de gangsters hauts en couleurs et de flics plus ou moins véreux. Les dialogues servent des situations surréalistes (« Tire encore ! Pourquoi ? Je vois son âme qui continue à danser ») et font de ce film une œuvre à part dans le paysage cinématographique actuel, mais finalement totalement cohérente dans la filmographie de ce réalisateur unique qu’est Werner Herzog.

mardi 9 mars 2010

Mad Max

Max est flic dans une brigade routière. A bord de son bolide Interceptor, il surveille les autoroutes qui traversent les paysages désertiques d’un futur indéterminé. Max est aussi un père, un mari et un copain. Son univers va s’effondrer lorsque ses proches seront tués par les membres des Aigles de la route, un gang de motards dégénérés. La fragile frontière qui le séparait des délinquants qu’il poursuivait éclate lorsqu’il entame sa croisade vengeresse.
Alors que les films de vigilante prennent habituellement pour cadre le milieu urbain, George Miller choisit le désert australien pour cadre de son histoire. Plus qu’un film de vengeance, Mad Max brasse de nombreux thèmes et mélanges les genres. Western lors de l’arrivée des motards en ville, film de vengeance et d’anticipation, film d’action pure et réflexion sur la nature humaine, Mad Max est tout cela à la fois.
Car comme le dit Max, seul son insigne le sépare de ceux qu’il appréhende, et l’animal qui sommeille en lui ne tarde pas à prendre le dessus sur son humanité quand on s’en prend à ceux qui l’aiment et qui constituent son monde. Preuve en est le masque de monstre en latex qu’il utilise pour faire rire sa femme. Lorsqu’i retourne chez lui après le drame, ce même masque entre ses mains symbolise l’animal qu’il est en train de devenir.
Faut-il se changer en monstre pour détruire d’autres monstres ? C’est la question dérangeante que pose le réalisateur, illustrant ses propos avec une maitrise formelle surprenante. La course poursuite qui ouvre le film est à ce titre exemplaire. Cadrée en plan serrés à l’intérieur de la voiture des fugitifs et de celle de Max, la scène fait s’alterner des travellings vertigineux et des plans larges qui rendent magnifiquement compte du travail réalisé par les cascadeurs.
Utilisant pleinement les paysages majestueux du désert australien qui s’opposent à l’espace réduit de l’intérieur des voitures, George Miller fait de son film un opéra rock où le rugissement des moteurs se substitue aux sons de l’orchestre.
Lorsque la voiture de Max franchit le panneau orné d’une tête de mort lui signifiant qu’il pénètre en zone dangereuse, c’est son destin qui bascule et qui l’amène vers les épisodes suivants. Car Mad Max n’est que le prélude au déchainement de violence quasi cartoonesque de Mad Max 2, véritable apothéose, délire baroque qui reste le modèle définitif du film post apocalyptique. Si Max s’égare un peu dans un troisième volet moins convaincant, nous attendons son retour avec impatience dans un Fury Road en préparation.

dimanche 7 mars 2010

Shutter Island

Shutter Island, une île où sont détenus et soignés des patients violents et dangereux. C’est aussi le théâtre d’évènements inexplicables, comme la disparition de Rachel Solando, accusée d’avoir tué ses trois enfants. Une prisonnière enfermée dans sa cellule qui s’est comme évaporée dans la nature. C’est pour enquêter sur cette mystérieuse affaire que débarquent le marshal Teddy Daniels et son coéquipier Chuck Aule.
Très vite, ils vont devoir se confronter au personnel soignant et particulièrement au psychiatre en chef, alors qu’une tempête coupe toute communication avec l’extérieur.
Le livre de Denis Lehane qui a servi de base au film constitue déjà un formidable matériau scénaristique. L’histoire de ce marshal qui va aller au bout de la folie pour démêler les fils d’une enquête à priori impossible à résoudre est d’une richesse exceptionnelle. En choisissant de l’adapter au cinéma, Martin Scorsese s’assure donc une histoire solide et des personnages passionnants à mettre en scène.
L’atmosphère inquiétante de Shutter Island qui oscille entre la réalité d’un cadre naturel imposant et les distordions d’un esprit dérangé est parfaitement rendu par le parti pris du réalisateur, celui de traiter son histoire par le biais du film de genre. Pour cela, Martin Scosese emprunte en effet les codes du film d’épouvante (une allumette craquée dans l’obscurité, des cachots rouillés et humides que l’on pourrait retrouver dans l’univers de Silent Hill), du polar (l’enquête des marshals confrontés à toute une séries de personnages plus ou moins troubles, des indices qui parsèment le parcours des policiers), du thriller psychologique (les retournements de situation, les faux semblants, les manipulations).
Tout le film concourt à créer cette atmosphère particulière, de la musique omniprésente durant les dix premières minutes du film, aux décors claustrophobiques et à l’éclairage des prisons. Shutter Island est donc la réunion de deux talents, celui d’un écrivain qui pose les bases d’une histoire particulièrement riche et propre à de multiples interprétations, et celui d’un réalisateur qui se l’approprie et l’illustre de façon magistrale.
Martin Scorsese, en grand directeur d’acteur, s’entoure comme toujours d’un casting impeccable. De Leonardo DiCaprio et Mark Ruffalo à Ben Kingsley et Emily Mortimer, tous les interprètes apportent une dimension particulière à leurs personnages. Le seul point faible du film semble être Michelle Williams qui n’a pas l’intensité nécessaire à un rôle pourtant essentiel. Alors que la brève apparition d’Emily Mortimer donne à son personnage une force impressionnante, les scènes oniriques qui mettent en scène la femme du marshal Teddy Daniels paraissent en comparaison moins puissantes et de ce fait ralentissent un peu le rythme du film.
Ceci étant, si on ne connait pas l’histoire avant d’avoir vu le film, on ressort de Shutter Island complètement bluffé, par le dénouement de l’intrigue mais également par la force de la réalisation et de l’interprétation des différents personnages de cette histoire tortueuse. Il semble alors nécessaire de revoir le film pour en comprendre tous les mécanismes, comme ce fut le cas pour Usual suspect ou Le sixième sens.
Martin Scorsese a depuis longtemps compris qu’une bonne histoire était la base d’un bon film. C’est une condition nécessaire mais pas suffisante. Il faut en plus une conjonction de talents pour l’illustrer et l’interpréter sans la trahir. C’est chose faite, et après Clint Eastwood (et Ben Affleck), Denis Lehane peut se vanter d’inspirer les meilleurs réalisateurs.