samedi 28 août 2021

American Nightmare 5

Après la cellule familiale, la ville, le pays, la Purge s’étant maintenant au-delà des frontières des Etats Unis, entrainant dans son sillage les prémices d’une guerre civile et des mouvements de réfugiés vers les pays frontaliers, Canada et Mexique en tête. Et plus elle s’étend au fil des épisodes, moins cette Purge a de choses à nous dire. 

Après un quatrième épisode franchement décevant qui invoquait les origines de la Purge et mettait en avant des militants noirs des droits civiques, c’est maintenant au tour des immigrés mexicains d’avoir les honneurs de combattre les militants dégénérés d’un nouvel ordre raciste et nationaliste. 

Alors que les trois premiers épisodes invoquaient l’explosion de la cellule familiale, l’exploitation des pauvres par les riches, la manipulation politique et sociologique avec une nervosité et un sens aiguë de la mise en scène, cet ultime (?) opus se contente de creuser un sillon déjà largement exploité avec une ironie facile (les riches blancs américains se réfugient au Mexique pour fuir l’oppression) et une réalisation sans imagination alignant les passages obligés sans imagination (les déguisements des émeutiers n’ont jamais été aussi pauvres) jusqu’à un final sans surprise. 

La saga American Nightmare aurait pu s’arrêter aux trois premiers épisodes qui exploitaient pleinement le potentiel de la série avec une hargne bienvenue et décomplexée non dénuée d’une charge contre la société américaine, ses inégalités de classes et les violences qu’elles génèrent. Rien de tout cela dans cette Purge Sans limite, si ce n’est celles de la créativité.

samedi 21 août 2021

BAC Nord

Qu’est ce qui provoque ce sentiment de malaise après la vision de BAC Nord ? 

Certainement pas la réalisation nerveuse de Cédric Jimenez qui suit au plus prés ces flics des quartiers nord de Marseille aux méthodes peu orthodoxes quand ils ne sombrent pas franchement dans le racket et l’extorsion. 

Pas non plus l’interprétation de ce trio incarné par Gilles Lellouche à fleur de peau, François Civil tour à tour lunaire et exalté et l’excellent bien que discret Karim Leklou en père de famille tiraillé entre ses nouvelles responsabilités et son quotidien sur une corde raide. 

S’il n’échappe pas aux passages obligés des films de flics (le traditionnel barbecue entre collègues, la dispute entre membres du groupe, les tensions avec la hiérarchie), le scénario de BAC Nord arrive néanmoins à ne pas tomber dans les poncifs du genre (on s’attend à ce que le nouveau père de famille y passe en premier ou que l’indic d’Antoine soit retrouvées dans le coffre d’une voiture) en ne comptabilisant aucun mort de premier plan. Et pour cause, Cédric Jimenez s’empare d’un fait divers survenu en 2012 pour suivre pas à pas la descente aux enfers de ces policiers peu scrupuleux. Et c’est là que le bat blesse. 

Le film s’ouvre sur un avertissement spécifiant que bien que basé sur un fait réel, l’histoire se dédouane de ce scandale pour ne se concentrer que sur la partie fictionnelle. Ce qui n’empêche pas le réalisateur de nous raconter ce que sont devenus les principaux protagonistes de cette affaire quelques années après leurs arrestations. Du coup, on ne sait plus ce que l’on regarde, un pur film d’action rondement mené n’ayant qu’un lointain rapport avec la réalité ou la propre version du réalisateur de cette condamnation ? La vision qu’il donne des quartiers nord contrôlés par des bandes de criminels masqués tout droit sortis d’un univers post apo correspond il à la réalité ou n’est ce qu’un trait forcé pour les besoins de l’histoire ? 

En refusant de se positionner comme une pure fiction ou une mise en lumière d’un fait divers, BAC Nord sème le doute. Là où les Misérables de Ladj Ly (avec qui BAC Nord entretient de nombreux points communs, l’assaut de l’immeuble en premier lieu) utilisait clairement la fiction pour raconter le réel, là où le récent Désigné coupable de Kevin Macdonald braquait le projecteur sur une affaire judiciaire avec une approche sciemment documentaire, BAC Nord reste le cul entre deux chaises, se dédouanant de la réalité tout en collant aux faits jusqu’à suivre le devenir des présumés coupables pour mieux enfoncer le clou. 

A tout prendre, il aurait été préférable de s’en tenir à un film policier tendu et parfaitement maitrisé en laissant de coté les protagonistes réels de l’affaire, le message serait tout aussi bien passé et le film aurait gagné en efficacité ce qu’il perd en objectivité.