mardi 28 avril 2009

Ponyo sur la falaise

Le monde de l’animation est rythmé par les productions de deux grands studios qui depuis quelques années nous livrent des œuvres majeurs et brillantes sans jamais se répéter : Pixar et Ghibli. Toute nouvelle œuvre de Hayao Miyazaki est un évènement.
Ce réalisateur de génie arrive en effet à construire un univers cohérent en se mettant à la portée des enfants et en livrant aux adultes un miroir pas toujours confortable mais jamais dénué d’espoir.
Ponyo sur la falaise est, de l’aveu même du réalisateur, l’adaptation du mythe de la petite sirène de Hans Christian Andersen dans le Japon d’aujourd’hui. C’est aussi le film le plus réussi de Hayao Miyazaki depuis Le Voyage de Chihiro en 2002, chef d’œuvre absolu jamais égalé.
Si le film s’adresse avant tout aux enfants par son traitement (couleurs pastelles, animation sans image de synthèse, histoire simple, encore que…), Ponyo reprend cependant les thèmes chers au réalisateur.
L’écologie tout d’abord, notamment celle des fonds marins pollués, la menace omniprésente que les hommes font peser sur la Nature. Le passage ensuite, des fonds marins à la terre, d’un univers à un autre, de l’enfance au monde adulte, renvoyant encore une fois directement à Chihiro. Le monde de l’enfance enfin, qu’il sait comme personne aborder de manière authentique, simple et sans aucune mièvrerie. Il nous l’a brillamment démontré avec Mon voisin Totoro, et l’a confirmé depuis dans chacune de ses réalisations.
Dans Ponyo, il parle de toutes les générations. De l’enfance bien sur au travers des personnages principaux, Sosuke, un petit garçon de cinq ans et Ponyo, petite sirène qui se transforme en fillette. Sosuke vit avec une mère hyper active qui travaille dans un hospice et un père capitaine de bateau trop absent. C’est en rejoignant sa mère sur son lieu de travail que Sosuke rend visite aux vieilles dames plus ou moins sympathiques qui symbolisent la vieillesse.
Rares sont les cinéastes qui arrivent à capter cette magie de l’enfance et à les représenter sans les caricaturer. Grace en soit d’ailleurs rendue à la version française de Ponyo qui pour une fois double l’ensemble des personnages avec justesse.
Quand à l’animation, simple et sans esbroufe, elle est tout simplement superbe. Que Ponyo soit représentée sous forme de « poisson à tête humaine » ou de petite fille qui découvre le nouveau monde qui l’entoure, les dessinateurs réussissent à la rendre attachante et incroyablement expressive avec une étonnante économie de moyens.
Ponyo est donc un film simple en apparence, facile d’accès mais qui parle de passage, de responsabilité, d’amour sans oublier de nous offrir avant tout un spectacle tour à tour émouvant, drôle ou impressionnant. Comme lors de l’attaque des vagues en pleine tempête, accompagnée par une musique aux accents wagnériens. Une fois encore, Miyazaki nous embarque pour une heure et demi de bonheur et nous en ressortons apaisé et heureux.

dimanche 26 avril 2009

La dernière maison sur la gauche

Lorsque Wes Craven réalise La dernière maison sur la gauche en 1972, il livre un film brut, dérangeant et provocateur. Bien que techniquement très imparfait, le film choque par les thèmes abordés (la violence et le sadisme cachés au font de chacun d’entre nous, la légitimité de la vengeance), le traitement sec et réaliste des scènes de meurtre.
Surfant sur la vague des remakes de films d’horreur des années 70 (Zombie, Massacre à la tronçonneuse, La colline a des yeux entre autre), Denis Lladis, ou plutôt Universal Pictures, décident de le réactualiser. Qu’en sort-il ? Un film bancal qui semble gêné par le sujet même qu’il aborde.
La trame de l’histoire est a peu de chose prés la même que l’original. Un groupe de meurtriers violent et tuent deux jeunes filles. Après un accident de voiture, ils trouvent refuge chez un couple qui se révèleront être les parents de l’une des jeunes filles. Leur vengeance dépassera en violence et en sauvagerie celles des agresseurs de leur fille.
La dernière maison sur la gauche version 2009 réserve quelques surprises, comme le meurtre de Francis, le frère du chef de la bande. Incroyablement longue et cruelle, cette mise à mort dénote dans un film mal à l’aise avec un sujet aussi difficile à traiter.
En effet, l’absence de moyen technique rendait le film original d’autant plus réaliste et percutant, à la manière d’un Maniac ou de Henry, portrait of a serial killer. Ici, le film est réalisé comme n’importe quel slasher et souffre continuellement de ce décalage entre le thème traité et le parti pris du réalisateur, si l’on peut qualifier de parti pris une réalisation quelconque dénuée de toute originalité.
Par exemple, après la scène de viol, une musique tragique vient souligner l’agonie de Marie Collingwood, comme si les faits auxquels nous venons d’assister ne suffisaient pas et qu’il fallait guider le spectateur vers les larmes. Cette dernière, malgré ce qu’elle subit, trouve le moyen de survivre et sera finalement sauvée et conduite à l’hôpital, refus flagrant du nihilisme du film de Wes Craven. De la même manière, le personnage de Justin, le fils adolescent et réticent de Krug apparait comme une sorte de bonne conscience au sein de la bande de meurtriers, comme pour nous indiquer qu’il y a tout de même une lueur d’espoir, une rédemption possible pour quelqu’un qui a été entrainé malgré lui sur une fausse route. Hors dans le film voulu par Wes craven, il n’y a aucune issue possible. La violence est partout, chez les agresseurs et chez les agressés, plus horrible encore si c’est possible.
N’est pas Haneke qui veut et lorsque l’on s’attaque à des sujets aussi délicats, il faut non seulement du talent mais aussi le cran d’aller jusqu’au bout de son œuvre. A ce titre, le final du film qui voit la tête de Krug éclater dans un micro onde s’adresse clairement au public de Saw 2, 3, 4, 5 et bientôt 6. La dernière maison sur la gauche est traité comme un énième slasher pour adolescent (que l’on voudrait) décérébré, suivant le remake de Prom Night et précédant celui de Meurtres à la Saint Valentin.
D’un casting inadapté qui n’inquiète pas une seule seconde, d’un réalisateur qui n’a pas su s’imposer face aux studios, d’un thème trop sensible pour servir de trame à un ersatz de Scream, il ne peut sortir qu’un remake tiède qui passe à coté de son sujet et qui laisse un goût d’inachevé. Ce film choc méritait mieux que cela.

dimanche 5 avril 2009

Monstre contre Aliens

Le scénario de Monstres contre Aliens part du même postulat que la Ligue des Gentlemen Extraordinaires de Alan Moore. Un groupe de créatures considérées comme des monstres par la société est envoyé par le gouvernement pour lutter contre une invasion extra terrestre.
A la différence de la bande dessinée, les monstres ne sont pas des figures de la littérature fantastique (l’homme invisible, Mina Harker, Mister Hide, Allan Quatermain, Dorian Gray et le capitaine Nemo), mais des références directes aux films de monstres des années 50.
L’héroïne Susan Murphy n’est autre que le personnage de l’Attaque de la femme de 50 pieds, le docteur Cafard est la Mouche Noire, Bob est le Blob, Insectosaure renvoie à Mothra (la mite géante qu’affronte Godzilla) et le Chainon manquant à l’Etrange créature du lac noir. Ces références sont clairement citées lors des flashes back présentant chaque personnage à Susan Murphy. Parmi les autres citations, notons que l’extra terrestre belliqueux semble tout droit sorti du Mars Attack de Tim Burton.
Outre ces références qui raviront tous les amateurs de fantastique, l’aspect politique du film n’est pas en reste en nous présentant un président des Etats Unis complètement irresponsable qui confond le bouton déclenchant l’attaque nucléaire avec celui de la machine à café.
Parsemé de moments de bravoure comme la bataille du pont digne des meilleurs Godzilla, Monstres contre Aliens verse parfois dans le pur délire lorsque le président improvise un morceau de musique à l’orgue pour entrer en contact avec les aliens (entre Rencontre du troisième type et E.T.), ou quand le docteur Cafard se met à décrypter le code donnant accès à l’unité centrale du vaisseau en dansant sur des touches de couleur.
Le film se regarde donc sur deux niveaux. Les plus petits seront ravis du spectacle drôle et enlevé que constitue cette nouvelle production des studios Dreamworks, les plus grands se délecteront de son aspect référentiel, de ses critiques politiques ou de la remise en question du couple que constituent Susan et Derek.
Bien sur, la comparaison avec les productions Pixar est inévitable et force est de constater qu’une fois de plus Dreamworks n’atteint pas la grâce de ses concurrents. Que ce soit dans la représentation des personnages humains, les scènes d’action ou la maitrise de l’histoire, chaque production Pixar (citons par exemple les Indestructibles qu’un Brad Bird hisse au niveau de chef d’œuvre) impose un niveau de qualité à chaque fois inégalé.
Pourtant, contrairement à Kung Fu Panda, les personnages sont cette fois plus attachants car plus développés, le second degré est plus assumé. Il en résulte un film réussi, pas encore un sommet du genre mais un spectacle tout à fait sympathique.