mardi 17 juillet 2018

Sicario - La guerre des cartels

Contrairement à Denis Villeneuve qui prenait le temps d’installer ses personnages et une intrigue centrée autour des cartels dans le premier Sicario, Stefano Sollima est un homme pressé. 
Pressé de dérouler une histoire aux multiples rebondissements, pressés d’aborder une multitude de thèmes aussi différents que la menace islamique, le business des passeurs à la frontière américano mexicaine, la politique étrangère agressive des Etats Unis. Et paradoxalement, il n’en traite aucun. 
Alors qu’il déroule des scènes d’action parfaitement chorégraphiées et mises en scène et qu’il peint une imagerie guerrière en phase avec le propos de son film, le réalisateur oublie en chemin ce qui est pourtant la colonne vertébrale du précédent opus, le scénario. 
Sicario La guerre des cartels ressemble à s’y méprendre à une série que l’on aurait condensée sur deux heures pour en tirer la substantifique moëlle, quitte à s’autoriser quelques raccourcis parfois malheureux. Alors qu’il bénéficie d’une scène d’introduction plutôt réussie plantant un contexte politique beaucoup plus large que le seul territoire des cartels mexicains, le film déroule ensuite une série de rebondissements pour finir par un sprint final et un épilogue qui laisse pas mal de questions en suspens. 
Techniquement très réussi et encadré par des interprètes chevronnés, Sicario 2 délaisse le caractère quasi mythologique du premier opus pour un film d’action perfusé aux séries les plus en vogues. Plus violent mais moins sombre que son prédécesseur, le film se veut également plus frontal malgré une vraie ambition formelle. 
Les personnages sont au service de l’action, soit l’exact inverse du film de Denis Villeneuve que l’on se prend à rêver aux manettes d’un troisième volet clairement annoncé.

samedi 7 juillet 2018

Les Indestructibles 2

Monstres et Compagnie, Le monde de Nemo, les plus grandes réussites du studio Pixar héritent parfois de suites nettement inférieures à leurs prestigieux modèles. C’est donc avec une attente teintée de crainte que l‘on accueille le deuxième opus de ce qui reste non seulement comme l’un des meilleurs Pixar, ce qui n’est pas peu dire, mais également l’une des représentations les plus réussies de super héros sur grand écran. Et là miracle, la magie opère une nouvelle fois. 
On pourrait disserter à loisir sur la fluidité de l’animation, de la profondeur et du travail de caractérisation des personnages, du découpage minutieux des scènes d’action (l’attaque du prologue et la confrontation entre bébé Jack et le raton laveur sont à cet égard des modèles du genre), de la réflexion sur le statut de super héros, le poids des images dans notre société, de la difficulté d’exister avec et malgré sa famille, les sujets abordés sont aussi nombreux que les points de vue. 
Puisant encore plus dans la mythologie des supers héros que le premier Indestructible, ce deuxième opus cite ouvertement Batman pour expliquer le traumatisme des Deavor, Spiderman dans la façon dont se déplace Elastigirl, quant au costume de l’Hypnotiseur, il pourrait sans problème sortir d’un album de Hellboy. Au travers de la famille Parr, Brad Bird aborde notamment la place de l’homme et de la femme dans une société dont les codes matriarcaux sont battus en brèche avec toutes les perturbations que cela peut occasionner. 
L’une des forces du film réside entre autres dans le soin apporté au contexte de l’histoire. Toute la galerie de super héros est parfaitement crédible et la plupart des personnages sont caractérisés en quelques secondes. On sent au-delà de l’histoire un vrai respect pour les thèmes abordés. Contrairement à la mode actuelle, les supers héros ne sont pas un cache misère prétexte à construire une histoire susceptible de plaire au plus grand nombre, mais un miroir de notre société, de notre famille et de nos préoccupations quotidiennes doublées d’une magnifique illustration de ce statu si particulier. 
Les Indestructibles 2 figure d’ores et déjà parmi les meilleurs films d’actions de l’année et c’est avec un plaisir intact que l’on retrouve Frozone, Edna Mode et tous les autres autour de cette famille si attachante dont le dernier rejeton constitue le principal moteur humoristique de l’histoire.

American Nightmare 4 : les origines

Au-delà d’une série B reposant sur un concept plus malin qu’il n’y parait (dans un futur proche, le gouvernement des États Unis accorde une immunité totale durant une nuit pour permettre aux citoyens d’évacuer leur agressivité et de diminuer ainsi le taux de criminalité le reste de l’année), The Purge déroule pendant trois épisodes inégaux mais intéressants par leur angle d’attaque (la cellule familiale, l’exploitation des pauvres par les riches, la manipulation politique et sociologique) une histoire aux multiples ramifications dans un contexte sociétal passionnant. 
Car au-delà d’une série un peu bourrine et savamment illustrée par les accoutrements des émeutiers, The Purge puise son concept dans l’histoire même des États Unis, celle d’une nation construite sur le droit à chacun de s’armer pour se défendre, de la libre circulation des armes, du capitalisme débridé et des inégalités de classes. 
Ce quatrième épisode entend donc nous expliquer l’origine de la première purge dans la lignée de l’émergence d’un nouveau parti politique, les Nouveaux Pères Fondateurs largement subventionnés par la NRA. C’est là l’idée la plus pertinente d’un film qui ne propose rien d’autre qu’un vague démarquage des précédents épisodes dont il pille les idées principales. 
La militante afro pour les droits civiques, le recours aux mercenaires, rien n’est vraiment nouveau, et surtout pas une caractérisation des personnages aussi grossière que caricaturale. Entre le politicien froid et arriviste et le dealer au grand cœur qui n’assume pas son statut de corrupteur d’une société déjà fragilisée par la détresse sociale, la noire grande gueule vague caution humoristique et l’héroïne militante, le film n’offre rien d’autre qu’une galerie de caricatures à peine digne d’une série Z. 
Mais là où les premiers opus assumaient la radicalité de leur propos et mettant en scène la violence exutoire d’une population redevenue sauvage, ce quatrième épisode élude même ce terrain-là puisque (SPOILER ALERT) ce sont des mercenaires au service du gouvernement qui commettent le plus grand nombre de crimes, et non plus une population à qui on vient d’enlever sa muselière (fin des SPOLIERS). 
Pas grand-chose à sauver donc chez cet American Nightmare quatrième du nom si ce n’est quelques scènes d’action suffisamment sauvages pour susciter un intérêt poli. C’est bien peu.