mardi 23 avril 2013

Clip


Elle s’appelle Jasna, elle a seize ans, et elle pourrait sortir d’un film de Larry Clark. A la différence prés qu’elle ne vit pas dans une banlieue américaine mais en Serbie. Et quoi que l’on en dise, les adolescents du monde entier ne se ressemblent pas. Même si le film n’aborde jamais le sujet directement, la guerre a laissé des traces. De la perte de certaines valeurs au nationalisme exacerbé des bandes de jeunes, rien ne sera jamais comme avant. C’est dans ce contexte qu’évolue Jasna, entre un père malade qui lui fait honte, une mère qui se tue au travail, des copines aussi paumées qu’elle et un garçon qui ne la regarde pas malgré tous ses efforts. Comme beaucoup de jeunes de son âge, Jasna essaie d’exister, de trouver le chemin qui fera d’elle une adulte. Faute de quoi elle se réfugie dans une imagerie mêlant pornographie et matérialisme effréné. Isidora Simijonovic qui incarne le personnage principal livre une prestation impressionnante, toute en colère intérieur ou au contraire charmeuse et envoutante. A ce titre, la scène érotique où elle mime un chien dans la chambre de son jeune amant est proprement hallucinante.
La réalisatrice Maja Milos traite son sujet frontalement, ne cherchant pas d’échappatoire pour décrire cette jeunesse à la dérive qui partage son temps entre sexe et drogue. Les scènes de sexe, clairement doublées, nous sont balancées en pleine figure. Il y a d’ailleurs plus de désespoir que d’amour dans ces relations mécaniques calquées sur l’univers du X.
Alors oui, le sujet rappelle bien Larry Clark, mais la différence s’arrête là. Car là où le réalisateur américain partage une certaine empathie avec ses personnages et laisse entrevoir une porte de sortie, même illusoire (voir la très belle scène de fin de Ken Park), Maja Milos ne leur accorde aucune chance de salut.
Le film se termine sur une scène désespérante qui conditionne le devenir de Jasna et de son amant. Elle embrasse un autre garçon, il la cogne, elle prend cela comme une preuve d’amour et retombe dans ses bras. Glaçant.

dimanche 21 avril 2013

Oblivion


La première chose qui frappe à la sortie du film est une impression de propreté. Une propreté suspecte et en total opposition avec le sujet de l’histoire qui se passe sur une Terre dévastée par une guerre atomique. Cela passe par des détails aussi révélateurs que par exemple l’absence totale de sang. Les drones qui surveillent le bon fonctionnement des centrales génératrices d’énergie traquent toute présence suspecte et mitraillent les humains survivants avec une rage qui renvoie directement à Terminator. Les malheureuses victimes éclatent sous l’impact des balles en gerbes d’étincelles alors que les corps devraient littéralement exploser sous les impacts. De même, Tom Cruise incarne un personnage malmené, passé à tabac, et même la crasse qui macule son visage semble appliquée avec calcul. Quand à son havre de paix qu’il cache à sa partenaire, on dirait une maison sortie tout droit d’une publicité suédoise. Si cette aseptisation colle parfaitement au personnage et au monde dans lequel évolue Vika, d’ailleurs remarquablement interprétée par Andrea Riseborough, elle dessert complètement celui de Jack Harper.
C’est d’autant plus dommage que le film bénéficie d’un scénario intéressant qui, s’il ne bouleverse pas le genre, réserve son lot de surprises. Les décors sont absolument grandioses et l’ensemble se suit avec intérêt, si ce n’est quelques longueurs dans le déroulé de l’action. Mais on sent tellement la volonté du réalisateur, ou des producteurs, de ne pas écoper d’un PG 13 que l’ensemble n’en devient plus crédible du tout. On est loin de la sueur et de la rouille qui suintait d’Alien ou plus récemment de District 9.
Oblivion est un film aux multiples influences (Matrix, La Guerre des Mondes, mais aussi Wall-E) qui rate son entrée dans la cour des grands films d’anticipation pour se ranger aux cotés de ceux, beaucoup plus nombreux, qui se compromettent pour ne pas choquer un public aussi large que possible.