Aux manettes de l’éminemment sympathique Bons baisers de Bruges, le réalisateur Martin McDonagh faisait déjà preuve d’un sens de l’humour pour le moins particulier avec sa galerie de personnages décalés à cheval entre provocation et mauvais goût assumé.
Dix ans plus tard, le revoilà avec une histoire qui semble écrite par/pour les frères Cohen, épaulé par un casting prestigieux et des personnages en or massif. Un alignement des planètes pour le moins inespéré pour un film qui ne l’est pas moins.
Loin de s’attacher à raconter une histoire linéaire, le réalisateur scénariste nous embarque dans une ballade en plein Missouri à la rencontre de protagonistes hauts en couleurs dont les destins vont se croiser, se télescoper pour le meilleur et souvent pour le pire. En effet, nous débarquons à Ebbing, Missouri alors que le drame a déjà eu lieu et le film se termine sans que la question principale sur laquelle repose le scénario ne trouve de réponse. Est-ce gênant pour autant ? Non, car l’enquête ne sera au final que le prétexte à une avalanche d’évènements en cascade tour à tour tragiques et comiques, doux amers et violents.
Et c’est bien là la force principale du scénario de refuser tout manichéisme au profit de personnages qui ne cessent d’évoluer tout au long du film. Servi par des interprètes d’une rare justesse, Three billboards arrive à condenser l’essence même de tous les ingrédients d’un film réussi. Des rôles parfaitement écrits, des acteurs complètement investis dans leurs personnages, des situations invraisemblables avec ce sentiment que tout peut arriver à tout moment, sans oublier un sens de la réalisation et une photo d’une rare qualité.
Notons pour l’anecdote une faute de raccord dans la scène où Jason Dixon, allongé sur le canapé, discute avec sa mère qui lui conseille d’importuner les amis de Mildred. Jason tient un sandwich à peine entamé à la main et après un plan de coupe sur sa mère on le voit avec une chips. Ceci dit, Three billboards regorge de scènes bluffantes comme l’incroyable passage à tabac de Red Welby en plan séquence ou la lecture des lettres du chef Bill Willoughby qui devrait tirer des larmes de crocodiles à plus d’un spectateur.
Dans un paysage cinématographique souvent aseptisé et binaire où les bons et les méchants sont caractérisés dès les dix premières minutes, Three billboards fait figure d’exception, un condensé de cinéma et d’écriture d’une rare densité et une performance d’acteurs et d’actrices comme on en voit trop peu sur grand écran.
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