mercredi 21 juillet 2021

Titane

Un accident de voiture doublement traumatisant (c’est papa au volant), une plaque de titane vissée sur le crâne, il n’en faut pas plus (mais pas moins) pour transformer une horripilante gamine en danseuse mutique et tueuse en série à ses heures perdues. Alors lorsqu’elle croise le chemin d’un père à la recherche de son fils disparu depuis dix ans, les choses prennent une tournure pour le moins inattendue. 

Qui trop embrasse mal étreint. On connaissait les qualités de mise en scène et les références au cinéma de genre de Julia Ducournau depuis son premier film, Grave, l’histoire limpide, certains diront simpliste, du réveil à la sexualité d’une jeune fille dont la vraie nature issue d’une longue tradition familiale s’avère pour le moins complexe à gérer. Des références, Titane en regorge. On y croise pèle mêle Crash pour la symbiose entre la chair et le métal, Baby Blood pour la grossesse monstrueuse, Martyrs pour le massacre collectif et le giallo en général pour les meurtres à l’arme blanche et son gout prononcé pour les lumières colorées. Pour ce qui est de la lisibilité de la trame, c’est une autre histoire. 

Passant d’une piste à l’autre et multipliant les directions narratives, la réalisatrice s’amuse à mélanger les genres (hyper féminisée au début, Alexia se voit progressivement dépouillée de tous ses attributs féminins, au sens figuré comme au sens propre) et les représentations sexuelles (des femmes alanguies nettoyant des voitures en maillot de bain devant le regard bovin des mâles hétéros jusqu’à l’imagerie porno gay du bal des pompiers et la dance lascive d’Alexia redevenue femme sous les regards désapprobateurs de ses camarades de caserne). 

Bourré d’allégories et d’interprétations possibles que l’on se fera un plaisir de commenter un verre de Spritz à la main, Titane n’a de cesse de dérouter. Formellement maitrisé et impeccablement filmé malgré une musique beaucoup trop démonstrative, alors que l’usage des chansons illustre parfaitement le propos du film, Titane explore trop de pistes qu’il laisse en chemin en compagnie d’un spectateur rapidement perdu. Alors oui les scènes pensées pour être choquantes le sont, mais on est loin de la dépravation morale et physique d’un Golden Glove ou Henry, portait d’un serial killer pour ne citer qu’eux. 

Julia Ducournau n’est pas David Cronenberg et, outre le mérite de sortir un film comme celui-ci en France et de se faire reconnaitre par ses pairs, force est de constater que la magie n’opère pas. Grand film malade ou exercice de style un peu vain et poseur, le temps fera son œuvre d’oubli ou de réhabilitation. Mais quoiqu’il en soit on sera là pour le prochain film de Julia Ducournau.

Aucun commentaire: