Il est toujours extrêmement désagréable d’être pris pour un imbécile, surtout quand on paye pour cela. C’est à peu près ce qui arrive aux spectateurs du nouveau film de Matt Reeves, déjà responsable d’un très surestimé Cloverfield.
Le film débute sous les meilleurs hospices par une séquence quasiment muette d’une dizaine de minutes. Nous y découvrons la vie d’une communauté de singes après qu’un virus ait décimé une bonne partie de l’espèce humaine. D’une chasse épique à des relations sociales en devenir, on se croirait revenu aux premiers pas de l’Humanité des milliers d’années en arrière. Jusqu’à ce que surgisse des hommes justement, et une femme. A partir de là, le film prend l’eau de toutes parts pour ne jamais s’en relever.
Qu’est ce qui cloche dans un blockbuster comme La Planète des singes ? Tâchons d’y voir plus clair.
Commençons par la caractérisation des personnages. Le héros Malcolm, volontaire comme un scout (Malcolm va dans le village des singes, Malcolm va chercher des médicaments, Malcolm aide les singes à s’échapper,..) est entouré de son fils, un adolescent tardif renfermé sur lui-même qui ne communique qu’à travers ses dessins (autant dire que l’on n’a jamais vu cela ailleurs) et sa copine qui passe son temps à s’inquiéter pour lui, à essayer de sympathiser avec son fils et qui tient aussi lieu d’infirmière, soit un condensé de tous les clichés féminins tendance maternelle au cinéma. Comme dans chaque camp il y a des bons et des gentils, le méchant coté homme est vraiment un « sale con » (dixit dans le film) qui passe son temps à braquer les singes, tandis que le méchant singe a une balafre en plein visage, un œil crevé et des dents pointus. Comme cela, si un spectateur un peu discret ou endormi perd le fil de l’histoire, il est sur de différencier le grain de l’ivraie au premier coup d’œil.
Continuons par l’interprétation. Jason Clarke est d’une fadeur rarement vue à l’écran, bien entouré par ses compagnons qui récitent tous des dialogues vides de sens sans vraiment y croire. Le seul à tirer un peu son épingle du jeu est Gary Oldman dont le personnage, dont on ne comprend jamais vraiment les motivations, finit par lâcher un très douteux « tirez sur eux, ce ne sont pas des personnes » !
L’histoire entend véhiculer des messages de tolérance et d’humanité mais elle le fait avec tant de lourdeur et de didactisme que cela en devient insupportable. Les dialogues sont à l’avenant d’un scénario qui cumule tous les poncifs du genre sans jamais s’embêter de la moindre crédibilité Passons sur le fait que les singes maitrisent le feu et le langage en quelques années et le maniement des armes à feu (fusil d’assaut et mitrailleuses lourdes) en quelques heures. Citons trois exemples (à ce niveau-là je ne parlerai pas de spoilers tellement les situations se devinent dix minutes à l’avance).
La première fois que Malcom va dans le village des singes, il est poussé et trainé dans la boue avant d’échouer sur la place principale devant César. La deuxième fois, ce dernier est au chevet de sa femme (femelle ?) malade. On devine tout de suite que nos héros vont gagner sa confiance en la sauvant, ce qui ne loupe pas. Alors qu’il a été banni, Malcom se voit gentiment conduire dans la demeure même de César, alors qu’il n’aurait même pas dû franchir l’entrée du village.
Deuxième exemple, lors de l’attaque des singes et de l’infiltration de Malcom, ce dernier se retrouve nez à nez avec l’un deux. Il y a peut-être deux cents singes en furie dans la tour, mais c’est devant le fils de César qu’il tombe, ce qui tombe bien pour la suite du scénario.
Dernière scène aberrante, Malcom, toujours lui, au pied de la tour et entouré par des kilos d’explosifs C4 que Dreyfus s’apprête à faire exploser. Un petit saut de côté au moment de l’explosion et de la chute de tonnes de béton et de ferraille et le voici qui ressurgit quelques minutes plus tard comme si de rien n’était.
A ce niveau-là ce n’est plus de la paresse scénaristique, c’est du mépris pur et simple envers le spectateur. Les producteurs et le réalisateur ont tout misé sur les singes, et La Planète des singes : l’affrontement est en effet une magnifique vitrine pour le travail incroyable réalisé par les équipes de Weta Digital. Mais un film est avant tout une histoire et des personnages auxquels on croit. Ici rien de tout cela, seule la scène inaugurale et le plan final sont à sauver. En fin de compte, il aurait été beaucoup plus intéressant d’évacuer toute présence humaine et de se concentrer uniquement sur les singes puisque tout le reste a été bâclé.
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