En 2011, Gareth Evans redéfinissait les contours du film d’action avec les bastons énervées et sauvages de The Raid. Trois ans plus tard, il n’a d’autres choix que de mettre la barre encore plus haut pour sa suite. Ce qu’il fait, sans pour cela trahir l’esprit de son premier acte, bien au contraire.
Commençons par ce qui fâche, Gareth Evans est meilleur réalisateur que scénariste. Animé des meilleures intentions et ne voulant pas se cantonner à un pur film d’action, le gallois nous livre deux heures trente de ce qu’il imagine comme une saga criminelle lorgnant du côté du Parrain. Sauf que dès les premières minutes du film le spectateur ne retrouve pas ses petits entre les multiples personnages et les intrigues qui partent dans tous les sens. Il s’ensuit deux heures trente d’une histoire cousue de fil blanc au sein de laquelle on perd tout intérêt pour ce qui arrive au héros lui-même. Gareth Evans n’a clairement pas les moyens de ses ambitions scénaristiques et c’est bien dommage. Car passée cette scorie, il nous offre un spectacle tout simplement inouï et jusque-là inégalé en termes de combats et d’action pure.
Alors que The Raid calquait sa structure narrative sur le jeu vidéo avec sa construction en niveaux et ses boss qu’il faut vaincre pour passer d’un étage à l’autre, The Raid 2 s’apparente quant à lui aux GTA et leurs mondes complètement ouverts. Quand on a compris que le déroulement de l’intrigue n’était pas le plus important, on prend un plaisir fou car, outre ses qualité de réalisateur et le soin qu’il apporte à ses décors et à sa photographie (on pense parfois à Only God Forgives de Nicolas Winding Refn), Gareth Evans apporte un soin tout particulier à ses personnages secondaires.
A l’instar d’un Quentin Tarantino à l’apogée de son talent à l’époque de Kill Bill, et qui déjà puisait son inspiration dans l’univers des mangas, le réalisateur créé des personnages iconiques que l’on n’est pas prêt d’oublier. Hammer Girl, l’Homme à la batte de base ball et le l’Assassin, en plus de nous offrir les plus beaux combats d’un film qui en compte des dizaines, ne se contentent pas d’être des hommes (et femme) de main parmi d’autres. En quelques plans le réalisateur les fait exister (les relations entre Hammer Girl et l’Homme à la batte de base ball par exemple), leur prête des sentiments et les rend plus vivants que le pauvre Rama qui traverse le film en rendant coup pour coup.
Citer les innombrables scènes d’anthologie ne suffirait pas à rendre justice au formidable travail des caméramans et des cascadeurs qui entourent Gareth Evans. Que ce soit la bataille rangée dans la prison, la poursuite automobile ou le combat dans la cuisine, on n’en finit pas d’écarquiller les yeux devant autant de générosité et de maitrise. Car oui, Gareth Evans maitrise sa caméra et son propos.
Assumant l’usage du gore et une violence décomplexée (il faut voir les chargeurs se vider en pleine tête à bout portant, ou le combat dans les cuisines du restaurant pour comprendre), ne versant pas dans la facilité d’un montage cut pour masquer la faiblesse des combats ou dans un humour potache pour désamorcer une violence que l’on n’assume plus (Expendables forever), le gallois fait le film qu’il veut envers et contre tout. Car on imagine que sortir un film de deux heures trente interdit aux moins de seize ans n’a pas dû être une partie de plaisir. Et quand on voit sur le net une scène coupée d’anthologie qui explore encore un peu plus la sauvagerie de l’affrontement entre les deux bandes rivales, on se dit que le garçon en a encore sous la pédale.
Que Gareth Evans embauche un scénariste digne de ce nom et il sera le roi du monde. Quant au troisième épisode, je n’ose même pas imaginer ce qu’il nous réserve.
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