dimanche 9 décembre 2012

Cogan : Killing them softly


Cogan navigue constamment entre deux eaux, celui du polar et du film ancré dans une réalité sociale qu’il entend remettre en cause. Cette dernière partie est nettement moins réussie. Dès le début, le réalisateur alterne les images d’archives et la fiction. La toile de fond en est l’Amérique d’Obama, avec ses discours rassembleurs et un peu utopiques dans la façon dont ils nous sont présentés. Cette volonté de rassemblement se heurte vite à une toute autre réalité, celle d’une Amérique en marge du rêve américain, des laissés pour compte qui n’ont d’autres alternatives pour survivre que le crime et des arnaques plus ou moins réussies. C’est dans ce contexte qu’apparait Cogan, un tueur à gage cynique pour qui l’Amérique n’est pas un pays mais un business à grande échelle où seuls les plus forts, les plus agressifs parviendront à s’en sortir. La dernière réplique de Brad Pitt résume à elle seule tout l’esprit du film. L’idée de base est alléchante mais le procédé utilisé par Andrew Dominik tombe tout de suite à plat. Les discours de Barak Obama ne se greffent jamais vraiment à l’histoire et apparaissent comme artificiels. Le procédé est grossier et seuls les personnages incarnés par un casting trois étoiles parviendront à tirer l’histoire vers le haut et à insuffler un réel discours social à ce film atypique.
Car la grande réussite de Cogan, outre son ton résolument pessimiste, vient de ses acteurs. Brad Pitt, encore une fois parfait, est entouré par l’immense et trop rare Tony Sopra… heu James Gandolfini qui retrouve entre autre son ennemi juré des Soprano, Vincent Curatola, alors que le père de Six Feet Under interprété par Richard Jenkins campe un intermédiaire réjouissant entre Cogan et les familles mafieuses. Ajoutons à cela Ray Liotta, Sam Shepard et nous obtenons le casting parfait pour un film de gangsters.
Les qualités du film ne se résument heureusement pas à son interprétation et à ses personnages. Après un démarrage lent, Cogan prend le temps d’amener l’ensemble de ses protagonistes vers un final nihiliste, en passant par des scènes de dialogues savoureuses, notamment entre Brad Pitt et James Gandolfini qui incarne avec délectation un tueur à la dérive.
(attention spoiler) Cogan est donc un vrai polar dont le réalisateur se plait à détourner les règles, filmant les scènes les plus violentes de manière crue (le passage à tabac de Ray Liotta) ou esthétiques (l’exécution de ce dernier)(fin du spoiler), ne reculant pas devant un discours sociale peu entendu dans les films actuels et inattendu dans un film de genre. Non dénuée de défaut, l’entreprise est suffisamment intéressante et culottée pour être saluée, et l’intérêt que l’on porte aux personnages ne fait qu’augmenter tout au long du film.

Aucun commentaire: