jeudi 13 mai 2010

L'élite de Brooklyn

Trois vies, trois destins, trois policiers new yorkais qui vont se croiser au cours d’une journée décisive pour chacun d’eux.
Eddie est à une semaine de la retraite. Alcoolique, suicidaire, c’est un homme usé qui trouve dans les bras d’une prostituée un substitut à sa solitude. Tango est infiltré depuis trop longtemps dans un réseau de dealers et a de plus en plus de mal à faire la différence entre sa vie de gangster et son rôle de flic. Sal est le père de quatre enfants, sa femme malade attend des jumeaux et il n’arrive plus à subvenir aux besoins de sa famille. Alors il franchit la ligne et vole de l’argent sale, allant jusqu’à tuer pour se couvrir.
On savait depuis Training Day qu’Antoine Fuqua était un réalisateur à suivre. Avec l’Elite de Brooklyn, il signe un film bouleversant et d’une efficacité redoutable. Tout semble réuni dans ce film pour en faire un model du genre.
Un scénario écrit au cordeau, simple et ancré dans le réel, qui fait la part belle à ses personnages.
Des interprètes magnifiques totalement investis dans leurs rôles. On n’avait pas vu Richard Gere aussi bon depuis… depuis quand déjà ? La VO permet d’apprécier la voix douce et grave de Don Cheadle qui cache une bombe à retardement toujours prête à exploser. Wesley Snipes est un parrain sur le retour incroyablement charismatique tandis que le personnage interprété Ethan Hawke, désespéré et torturé par une morale chrétienne qui n’arrive pas à le sauver de lui-même, renvoie par moment au Bad Lieutenant d’Abel Ferrara. Quand aux seconds rôles, loin d’être sacrifiés comme c’est trop souvent le cas, ils sont tous parfaitement écrits et interprétés.
La musique accompagne merveilleusement la tragédie qui se déroule devant nos yeux.
La réalisation et le montage du film enfin, sont exemplaires. Alors qu’il aurait pu être tenté par un bouleversement de la chronologie des scènes ou par une succession de scènes ultra courtes pour accentuer encore plus le tragique des situations, Antoine Fuqua opte pour une réalisation d’une lisibilité totale alternant avec grâce les moments d’actions mettant en scène les trois personnages simultanément (la scène de l’épicerie – du règlement de compte sur le toit – de la descente de police, et la scène finale sont à ce titre des modèles d’efficacité), et des instants de répits et d’émotions.
A la fois polar et chronique sociale des classes moyennes américaines, l’Elite de Brooklyn pourrait être le pendant au cinéma de la série The Shield à la télévision. Le film prouve, si besoin était, qu’il n’est nul besoin d’effets spéciaux, de montages cut, de 3D ou autres racolages pour réussir un bon film. Il suffit d’une excellente histoire, de personnages remarquablement bien écrits, d’acteurs qui s’effacent derrière leurs rôles, d’un réalisateur honnête et talentueux.
La coordination de tous ces éléments est suffisamment rare pour que l’on apprécie pleinement la perle noire qu’est l’Elite de Brooklyn.

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