Julien Leclercq ne s’en cache pas, il voue une grande admiration au cinéma de Michael Mann, au point d’avoir acheté pour Braqueurs une partie du bruitage des fusillades de Heat (douilles éjectées, culasses qui claquent, impact des balles, détonations) qui conféraient au film sa tonalité si particulière. Et Braqueurs suit clairement la trace de son auguste modèle.
Par son ancrage profondément urbain d’abord. Sans égaler l’esthétique du réalisateur américain, Julien Leclercq s’attache à donner à son film un côté profondément réaliste qui passe avant tout par ses personnages et ses scènes d’actions. Braqueurs de banques ou dealers d’héroïnes, les protagonistes qui se croisent et s’affrontent paraissent tous crédibles grâce à une distribution sans strass mais d’autant plus solide menée par un Sami Bouajila aussi sobre que charismatique. Les personnages de Braqueurs sont issus des banlieues, de toutes origines ethniques et des classes sociales les moins favorisées. Blancs, noirs ou rebeus, le réalisateur parvient à caractériser chaque rôle en quelques plans et à faire exister ses nombreux protagonistes tout au long de l’histoire. Les scènes de fusillades qui servent à faire avancer l’histoire, ce qui n’est pas toujours le cas dans le genre codifié du thriller, sont parfaitement maitrisées et crédibles, filmées au plus près de l’action avec un constant souci d’immersion de la part du réalisateur.
Si Braqueurs se montre redevable à l’univers de Michael Mann, c’est aussi à travers le personnage de Yanis interprété par Sami Bouajila. Un grand frère protecteur, un fils répudié et un homme solitaire, constamment sur le fil du rasoir. Un chef de bande qui parle peu et qui ne vibre plus que par les braquages qu’il planifie des semaines à l’avance. Un personnage que l’on pourrait retrouver dans Heat et qui a plus d’un point commun avec Neil McCauley joué par Robert De Niro.
Concis, sec et nerveux, Braqueurs nous embarque dès les premières minutes au sein de cette communauté hors la loi qui vit en marge de la société, des hommes aux motivations aussi multiples que leurs personnalités et leurs vécus. Loin des clichés habituels, Julien Leclercq invoque la banlieue parisienne et prolétaire plutôt que les boites de nuit luxueuses comme décor de son intrigue. Quand les braqueurs fêtent leur prise de butin, c’est dans un restaurant asiatique et quasiment en famille, pas dans une boite avec des rails de coke. Lorsque le réalisateur filme une scène de sexe, il évite les bimbos siliconées et les putes de luxe pour laisser place à un ouvrier et une serveuse qui font l’amour comme on s’accrocherait à une bouée de sauvetage, et cela n’en est que plus beau.
Loin d’être une pâle copie de ses grands frères américains, Braqueurs prouve une fois de plus l’excellent santé du polar français, et on ne peut que s’en féliciter.
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