samedi 19 octobre 2013

9 mois ferme


Si Albert Dupontel est loin de faire l’unanimité depuis ses débuts à la réalisation, on ne peut pas lui reprocher de manquer d’intégrité et de cohérence tout au long de sa (courte) filmographie. Depuis Bernie, il se plait à mettre en scène et interpréter des marginaux, des asociaux, ces gens que la société rejette et qu’elle fait tout pour ne pas voir. Il en résulte à chaque fois un joyeux bordel, fruit de la confrontation entre ces héros hors normes et un ordre établi. Avec 9 mois ferme, Dupontel déplace son sujet vers un autre terrain. S’il incarne toujours un repris de justice qui n’a que faire des lois, celui-ci n’entre pas en guerre contre le système. Au contraire, un concours de circonstances qui va lui faire croiser le chemin, et bien plus, d’une juge célibataire endurcie va l’amener à entrer de plein pied dans sa vie et le confronter à ses responsabilités. De plus, le personnage de Bob qu’il incarne ici n’est plus vraiment au centre de l’intrigue comme c’était le cas auparavant. La véritable héroïne de l’histoire est bien la juge Ariane Felder, brillamment portée par une Sandrine Kiberlain qui oscille constamment entre rigidité et fragilité.
Mais s’il est une chose qui ne change pas, c’est bien l’utilisation de la caméra comme un outil à part entière du langage cinématographique. Après un générique virevoltant en plan séquence, le réalisateur nous plonge directement dans les arcanes de la magistrature en nous faisant croiser des personnages caricaturaux mais surs de leur bon droit.
S’ensuivent une heure trente de scènes aussi drôles qu’émouvantes, portées par des acteurs qui s’en donnent à cœur joie et une série de caméos absolument irrésistibles. De Jean Dujardin à Terry Gilliam en passant par Jan Kounen, Gaspard Noé et les inévitables Yolande Moreau et Boulli Lanners, c’est à un vrai festival de gueules hors du commun que nous convie un directeur d’acteurs que l’on sent omniprésent et impliqué dans son projet.
Loin de toute démonstration ostentatoire, Dupontel alterne les moments de grâce (ce plan qui s’élève au dessus de Sandrine Kiberlain pour se terminer sur le bébé qui grandit dans son ventre), les scènes franchement comiques (le running gag avec le juge de Bernard qui n’arrête pas de se prendre des coups, la plaidoirie de maitre Tolos, le témoignage des vieilles à la télévision,…) et des séquences où l’émotion est à fleur de peau.
Moins frontal que Bernie, introspectif que Le créateur et cartoonesque que Enfermé dehors, 9 neuf mois ferme est une nouvelle pierre aussi solide que les autres dans l’œuvre d’un homme qui a su rester libre.

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