mardi 1 janvier 2013

Touristes


Après le formidable Kill List, Ben Wheatley revient avec une comédie grinçante dans laquelle il s’intéresse à un couple d’anglais très moyens, populaires dans le sens le plus péjoratif du terme. Tina, et Chris sont en effet des personnages à la limite de la caricature, adeptes des voyages en caravane, des musés de toutes sortes et accessoirement des meurtres en série. Car s’ils cumulent pas mal de travers, ils ne supportent pas ceux des autres. Un papier jeté par terre, un enterrement de vie de jeunes filles trop bruyant, des voisins de camping un peu hautains, il n’en faut pas plus pour déclencher des exécutions expéditives et débarrasser le monde de ceux qu’ils considèrent comme nuisibles. Touristes est donc une comédie noire mais ne se limite pas à cela. En faisant le portrait de ces classes moyennes que l’on peut vite classer dans la catégorie des beaufs, le réalisateur jette un regard cynique sur notre société, notre capacité à supporter les autres et à communiquer nos sentiments. Car ces meurtres ne sont rien d’autres que l’expression d’une frustration sociale ou affective et remplacent le langage qui est paradoxalement plus difficile à manier.
La scène où Tina commence une lettre à son amant à l’aide d’un crayon géant acheté dans un musé est à ce sens représentative de l’esprit du film. Le crayon disproportionné symbolise son incapacité à exprimer ses sentiments par écrit, et il lui sera beaucoup plus facile d’envoyer une jeune fille trop entreprenante se fracasser la tête contre les rochers.
On peut reprocher au réalisateur un manque d’empathie vis-à-vis de ses personnages dont les actes ne sont jamais clairement expliqués. C’était déjà le cas pour son précédent long métrage mais cette distanciation conférait à Kill List une atmosphère glaciale, presque clinique qui servait merveilleusement bien son sujet. Ici, on aurait préféré plus de proximité avec ce couple hors norme pour partager avec eux cette folie meurtrière au final assez jouissive.
Si certaine scènes de Touristes renvoient directement à Kill List, comme ce rituel païen en plein camping, et malgré un final d’un cynisme absolu, le film n’arrive pas à se hisser au niveau de ce dernier. Ce n’était pas le projet du réalisateur de refaire le même film et on ne peut qu’attendre avec impatience son prochain projet qui s’annonce comme beaucoup plus ambitieux.

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