jeudi 21 août 2008

Surveillance

Il est tentant de chercher dans les films de Jennifer Lynch des réminiscences de l’univers si particulier de son père.
Si la première partie de Surveillance peut parfois faire penser à une extension de Twins Peaks, la réalisatrice réussit toutefois à imposer son style pour raconter une histoire atroce par le biais des regards croisés des différents protagonistes de ce drame.
Suite à des agressions sauvages dans le sud des Etats-Unis, deux agents du FBI sont envoyés sur les lieux pour interroger les trois témoins rescapés. Un policier traumatisé par la mort de son partenaire, une junkie et une petite fille. Chacun donne sa version des faits sous l’œil et les caméras de l’agent joué par Bill Pullman.
Jennifer Lynch place le spectateur au coté de Bill Pullman pour suivre les interrogations des différents témoins et recouper les histoires de chacun. Sauf lorsque celui-ci laisse échapper un geste de complicité amoureuse et c’est alors la petite fille qui prend sa place derrière la caméra de surveillance qui s’en aperçoit. Tout le monde ment pour cacher des faits gênants et se protéger. Tout le monde sauf la petite fille dont le regard est le seul à être innocent. C’est par les yeux de l’enfance que la vérité apparaîtra, plus tordue que tout ce qui nous a été donné de voir jusqu’à présent.
Le principal intérêt de Surveillance ne réside pourtant pas dans sa chute et sa révélation finale. Celle-ci se devine en effet assez vite, surtout en tenant compte des spoilers et des indices qui pullulent dans la presse et qui viennent de plus en plus gâcher la surprise des films, du moins ceux qui nous en réservent encore. La force du film, outre sa construction donc, réside dans la galerie de personnages que Jennifer Lynch dépeint de manière crue et sans artifice. Des flics pourris et vicieux aux tueurs machiavéliques, Surveillance doit autant à Tueurs Nés qu’à The Devil’s Rejects. Chaque personnage cache derrière son discours officiel et l’image qu’il projette une vérité dérangeante et seule l’enfant, d’une froideur assez incompréhensible après tout ce qu’elle a vécu, sera à même de découvrir la vérité car elle-même ne cache rien. C’est d’ailleurs ce qui la sauvera alors que tous les autres acteurs de cette pièce de théâtre tragique seront sacrifiés.
La réalisatrice exploite à fond ces paysages désertiques et écrasés de chaleur des Etats-Unis, si propices aux exactions et aux attaques des serials killers. Ces tueurs pour qui elle éprouve une réelle empathie, proche encore une fois d’un Oliver Stone ou d’un Rob Zombie.
Surveillance est au final un film certes imparfait, avec quelques longueurs, des personnages parfois un peu caricaturaux et quelques facilités scénaristiques. Mais le film témoigne surtout du regard d’une vraie réalisatrice qui ne recule devant rien pour imposer sa vision des choses, et mettre en scènes des personnages controversés, déviants, rebutants et au final que l’on se surprend à trouver attachants. Jennifer Lynch est une réalisatrice à surveiller !

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