Si le second film de Christopher Nolan consacré au chevalier noir reprend l’intitulé de la saga de Franck Miller, ce Dark Knight n’en est pas pour autant l’adaptation.
En effet, la bande dessinée nous présentait un Batman vieillissant qui, décidant de reprendre les armes pour nettoyer les rues de Gotham City, se retrouvait face aux critiques d’une population divisée en partisans et opposants à ses méthodes. Devenant peu à peu un élément anarchique incontrôlable, Batman s’opposait alors au gouvernement par l’intermédiaire de son représentant Superman.
Dans le film, certains éléments de l’œuvre de Franck Miller sont repris, comme les citoyens déguisés en Batman qui essaie de l’imiter, ou la population de la ville, parfois positive mais le plus souvent critique et hostile. Batman est fatigué de vivre cette double vie de justicier masqué et l’arrivée du procureur Harvey Dent, aussi inflexible que lui dans la lutte contre le crime, pourrait bien être l’occasion de donner à Gotham City un vrai héros qui pourrait agir à visage découvert.
Mais c’est sans compter la brusque apparition du Joker, un psychopathe surgit de nulle part (mais annoncé à la fin de Batman Begins) bien décidé à mettre la ville à feu et à sang.
Après avoir exploré de manière originale les origines du mythe, Christophe Nolan livre avec The Dark Knight un second volet beaucoup plus sombre que tout ce qui a déjà été fait à propos de ce personnage, Batman Returns de Tim Burton mis à part. Le personnage de Batman trouve en la personne du Joker son double inquiétant, un personnage masqué qui fait de Gotham City son champ de bataille. « Nous sommes des monstres » clame le Joker à son ennemi, et il lui précise qu’il n’est qu’un instrument dont se servent les forces de police. Jusqu’à ce qu’ils le jettent.
Mais qui se sert de qui ? C’est toute la complexité des relations qui unissent les différents personnages de ce film dense et complexe. Le procureur Harvey Dent, le lieutenant de police Jim Gordon, le justicier Batman, le milliardaire Bruce Wayne, la fiancée (de qui ?) Rachel Dawes, le Joker bientôt rejoint par Double Face, le mafieux Salvatore Maroni, le maire de Gotham. Tout le monde utilise ceux ou celles qui peuvent l’aider à atteindre son but, avec souvent des conséquences désastreuses.
Outre les qualités de réalisation du film, que ce soit dans les scènes intimistes ou les spectaculaires séquences d’action, la cohérence et l’écriture de chaque rôle, une interprétation impeccable, la réussite de ce Dark Night vient en grande partie du personnage du Joker. A mille lieues du super vilain cabotinant à outrance interprété par un Jack Nicholson en roue libre, Heath Ledger habite littéralement son rôle. Il fait de son personnage un vrai tueur psychopathe, un homme sans autre valeur que celle de l’anarchie et de la destruction. Les tendances suicidaires du Joker dans le film font d’ailleurs étrangement écho à la disparition tragique de l’acteur quelque temps après la fin du tournage. Son rôle n’en est que plus émouvant, mais ce n’est pas la mort Heath Ledger qui lui donne cet impact, mais bien une qualité d’interprétation impressionnante.
Face à lui, Batman se retrouve devant un miroir déformant qui lui renvoie une image de ce qu’il pourrait devenir s’il ne contrôle pas ce sombre chevalier qui est en lui. Le film souffre d’un seul défaut, il est un peu trop long et certaines scènes auraient gagné à être écourtées. Ceci dit, entre les exactions aussi drôles que cruelles du Joker (le crayon qui disparaît, la bombe cousue dans le ventre d’un complice, le braquage qui ouvre le film,…) les disparitions de personnages importants, la naissance de Double Face qui marque la victoire du Joker, et la fin qui voit Batman se faire pourchasser par des chiens et des policiers comme un paria, The Dark Night est définitivement la vision la plus noire, et sûrement la plus juste, d’un personnage ambivalent qui n’a sûrement pas fini de faire parler de lui.
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