Qui n’a jamais observé un enfant en train de piétiner une fourmilière ou d’écraser un ver de terre pour éprouver sa supposée supériorité et imposer sa tyrannie du haut de ses cinq ans ? Qu’adviendrait-il alors si ces mêmes enfants se trouvaient dotés de pouvoirs incommensurables et laissaient libre cours à leurs instincts ?
C’est de ce postulat que part le réalisateur norvégien Eskil Vogt pour explorer le monde de l’enfance à travers le prisme d’un conte horrifique filmé à la hauteur de ses protagonistes. Car si les mères sont reléguées à des rôles subalternes, les pères eux sont carrément absents et laissent libre court à un déchainement de violence aussi glaçant qu’inéluctable.
D’une cruauté étonnante, The innocents ne se départ pourtant pas d’une luminosité constante, comme si l’horreur n’avait pas besoin de recoins sombres pour frapper. Et c’est bien cette menace perpétuelle dans la seconde partie du film qui nous tétanise, cette certitude que la mort peut surgir de partout, et tout particulièrement de la cellule familiale, cauchemar ultime pour un enfant.
Isolés du reste de la communauté et dotés de handicaps physiques (décoloration de la peau), mental (autisme) ou psychologique (le tueur en série en devenir), les enfants constituent, une fois n’est pas coutume, l’atout principal du film. D’une justesse étonnante, il suffit d’un simple regard ou d’un visage contrarié pour que la caméra du réalisateur nous force à reconsidérer la scène avec un point de vue radicalement différent.
Si le film souffre de quelques longueurs, The innocents impose son rythme et sa vision de l’enfance, celle des cauchemars et des peurs enfouies, des frustrations et de la violence refoulée, loin du monde des adultes qui de toute façon ne les comprendraient pas.
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