samedi 11 mai 2019

Le combat ordinaire

Rares sont les œuvres qui, 15 ans après leur publication, conserve le même impact qu’à la première lecture. Plus rares encore sont celles qui tendent à l’universel par leur capacité à s’adresser à chacun d’entre nous tout en brassant des thèmes aussi personnels et sensibles que la paternité, la mort de nos parents, l’engagement familial. Le combat ordinaire, série de 4 albums scénarisés et dessinés par Manu Larcenet de 2003 à 2008 est de ceux là, ces livres qui nous marquent de façon indélébile et nous accompagnent tout au long de notre existence, ces albums que l’on a envie d’offrir à tous ceux qui nous sont chers pour partager ces tranches de vie, miroirs de nos propres angoisses. 
Idéalement positionné entre l’apparente insouciance du Retour à la terre et la noirceur désespérée de Blast, Le combat ordinaire suit le personnage de Marco, un photographe névrosé qui, de rencontres en analyses, de déceptions en menus plaisirs va trouver sa place dans une existence peuplée par les fantômes du passé et les angoisses du futur. 
Manu Larcenet n’a pas son pareil pour, d’un simple trait de crayon ou d’une réplique ciselée, cerner les doutes et les travers de cette galerie de personnages qui entourent Marco. Refusant toute démagogie quand il aborde des sujets politiques (les électeurs du Front National, la Guerre d’Algérie, la fermeture des usines), l’auteur tisse au fil de ses 4 tomes une réflexion sensible sur ces petits riens qui font une vie. Marco est confronté à la maladie et à la mort de son père, à la vieillesse et à la solitude de sa mère, à ses peurs devant la responsabilité de devenir père à son tour, aux sacrifices qu’il faut consentir pour trouver sa place dans la société, et tout cela est traité avec une infinie délicatesse. 
Manu Larcenet nous parle de ses propres peurs et par là il s’adresse directement à chacun de nous, de l’enfant insouciant à l’adulte angoissé sauvé par quelques parenthèses de vrais bonheurs. Le combat ordinaire est celui de nos vies, Manu Larcenet en a fait une œuvre miroir d’une intelligence et d’une sensibilité rares.

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