Le nouveau film de Clint Eastwood représente en quelque sorte la jonction parfaite entre sa mythologie des États Unis vue au travers d’histoires vraies mais hors du commun de citoyens américains ordinaires (American Sniper, Sully, Le 15H17 pour Paris) et sa propre mythologie incarnée derrière et devant la caméra et essentiellement basée sur la rédemption (Impitoyable, Million dollars baby, Gran Torino).
En ce sens, La mule est en effet un film très personnel mais aussi une pierre supplémentaire dans son panthéon de personnages hauts en couleur qui font individuellement la grande Histoire de ce pays de tous les possibles. Clint Eastwood incarne donc Earl Stone, mauvais mari, mauvais père de famille mais pépiniériste accompli qui, poussé par la faillite de son entreprise, va accepter de transporter de la drogue pour le cartel de Sinaloa. L’argent coule à flot mais coincé entre la DEA, les trafiquants et sa famille, l’étau se ressert autour d’un homme au crépuscule de sa vie. Car comme le dit si bien Earl, l’argent achète tout sauf le temps qui passe inéluctablement, ne laissant que des regrets à ceux qui n’ont pas su en profiter.
Film testamentaire, drame parsemé de saillies comiques (la dernière réplique du film lancée par la fille d’Earl est à ce propos irrésistible), biopic fantasmé d’un destin hors du commun, La mule est un peu tout ça en même temps, portée par le visage tanné d’un immense acteur qui se voit en homme ordinaire avec ses failles et ses propres amertumes.
Entouré par de solides interprètes, Clint Eastwood se dévoile avec ce qu’il faut de pudeur et un sens de la mise en scène toujours aussi juste. Sans atteindre l’épure sentimentale de Sur la route de Madison ou la puissance narrative d’un Gran Torino, La mule nous rappelle que le grand Clint en a encore sous le pied et qu’il faudra compter avec lui. Très longtemps on l’espère.
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