lundi 26 septembre 2016

Juste la fin du monde

Xavier Dolan est un roublard qui utilise pour parvenir à ses fins des ficelles tellement grosses qu’elles devraient nous rester en travers de la gorge. Sauf qu’il combine tellement roublardise et talent que la formule, toute prévisible qu’elle soit, fonctionne, la plupart du temps. 
En adaptant pour son dernier film une pièce de théâtre servie par des acteurs français, le réalisateur n’évite pas certains écueils qui éloignent Juste la fin du monde du coup de boule émotionnel que reste à ce jour Mommy. Très, parfois trop écrit, le scénario ne laisse pas toujours une place suffisante aux cinq interprètes qui déroulent pourtant une partition intéressante. 
Mis à part un Gaspard Ulliel souvent agaçant derrière un mutisme un peu poseur, la famille comme d’habitude dysfonctionnelle chez Xavier Dolan, constitue un véritable champ de bataille heureusement apaisé par le personnage de Marion Cotillard que l’on n’a pas vu aussi juste depuis longtemps. Entre Nathalie Baye grimée à l’excès (les mères sont de toute façon physiquement et psychologiquement excessives chez le réalisateur), Léa Seydoux en jeune adulte paumée en manque de modèle et Vincent Cassel sur le point d’exploser à chaque instant, Louis a bien du mal à annoncer sa mort prochaine, à trouver sa place au sein de ce clan dont il s’est éloigné, et à se retrouver lui-même, entre souvenirs d’enfance, rendez-vous manqués et futur incertain. 
Et c’est bien de la difficulté d’exprimer nos sentiments dont il est question, particulièrement entre membres d’une même famille qui s’aiment au moins autant qu’ils se haïssent. Toujours juste sur les dialogues et malgré une direction d’acteurs un peu trop figée, Xavier Dolan use de la musique comme il l’avait fait dans Mommy pour exacerber trop facilement des sentiments ou des moments clefs partagés par les protagonistes. Et comme dans son précédent film le procédé fonctionne, on se laisse entrainer par ce tourbillon d’engueulades et d’injures, de cris et de pleurs qui cachent mal une tendresse trop difficile à exprimer. 
Toujours entier, pour ne pas dire excessif, Xavier Dolan dépeint en frôlant parfois la caricature ces deux frères que tout oppose dans une perpétuelle confrontation émotionnelle, incapable de se sauver l’un l’autre et encore moins de se comprendre. En dépit de quelques moments de longueur, Juste la fin du monde marque un jalon supplémentaire sur le chemin que suit un réalisateur aussi brillant qu’agaçant.

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