Rarement un film aura autant mérité le prix de la mise en scène à Cannes que Drive. Après des débuts aussi intéressants qu’inégaux, Nicolas Winding Refn livre un film dont chaque scène semble avoir été pensée en termes esthétiques tout en servant admirablement l’histoire qu’il raconte.
Cette histoire, c’est avant tout celle d’une rencontre entre un jeune homme froid et taciturne et une jeune mère de famille qui ne demande qu’à tomber amoureuse. Même si Drive brasse des thèmes aussi diverses que le film de gangster, la vengeance, le film de poursuite, c’est avant tout d’une histoire d’amour tragique dont il est question.
Le réalisateur qui semble chérir les personnages peu expansifs filme avec brio toute une galerie de personnages au milieu desquels se détache un Ryan Gosling impressionnant de sobriété et d’humanité cachée. Alors qu’il ne prononce que peu de mots, ses accès de violence n’en sont que plus crédibles et effrayants. Face à lui, Carey Mulligan campe une jeune femme loin des canons esthétiques des films de genre, à la fois fragile et déterminée à élever seule son petit garçon. Le reste de la distribution est tout aussi impressionnant, entre un Brian Cranston dont le talent n’est plus un secret depuis son interprétation vertigineuse dans la série Breaking Bad, Albert Brooks en mafioso redoutable et un Ron Perlman autrement plus intéressant que dans le récent Conan.
Drive est donc un film beau et intelligent porté par une bande son décalée et une photo superbe, une histoire qui semble suivre les sentiers mille fois empruntés du film de gangster pour mieux bifurquer là où on ne l’attend pas, vers la rencontre d’un homme et d’une femme qui auraient pu vivre heureux ensemble si les vents contraires de leurs destins ne les en empêchait.
Après Bronson et sa trilogie Pusher, Nicolas Winding Refn entre enfin dans la cour des grands sans renier les thèmes qui lui sont chers (les personnages atypiques, la description de microcosmes en marge de la société, la solitude, l’engrenage de la violence). La suite nous montrera s’il saura renouveler ce coup de maitre.
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