mercredi 27 mai 2009

Vengeance

Retrouver Johnny Halliday dans un film de Johnnie To est aussi surprenant que de voir Eddy Mitchell tourner pour Scorcese. Et pourtant, notre chanteur acteur colle parfaitement à ce rôle écrit à l’origine pour Alain Delon en hommage aux polars de Jean Pierre Melville qui passionnent les cinéastes asiatiques, John Woo en tête.
Johnny Halliday incarne un ancien tueur perdu à Hong Kong sur les traces de ceux qui ont massacré la famille de sa fille. A l’image de son personnage, il traverse le film avec un air halluciné, aussi à l’aise dans cette ville dont il ignore tout qu’un poisson en plein milieu du désert. De ce fait, on peut dire que l’acteur colle parfaitement à son personnage.
Et ce n’est pas la seule particularité qui fait de Vengeance un film étrange, décalé et en tout cas intéressant.
Johnnie To choisit de mettre en scène un tueur vieillissant qui perd peu à peu la mémoire. Il en profite pour se questionner sur la notion de vengeance, thème récurrent des polars de toutes nationalités. Que signifie le fait de vouloir se venger quand on a oublié ceux qui vous ont fait du mal et jusqu’aux blessures qu’ils vous ont infligées ?
Pour être sur d’aller au bout de la promesse qu’il a faite à sa fille mourante, Francis Costello achète les services d’un trio de tueurs haut en couleurs dont le chef est interprété par l’excellent Anthony Wong Chau-Sang, déjà croisé dans Exilé du même Johnnie To, Infernal Affairs de Andrew Lau ou Time and Tide de Tsui Hark. Lorsque ceux-ci découvriront qui a commandité le meurtre de la famille du français, l’affaire prendra une ampleur qu’ils ne soupçonnaient pas et les conduira vers une fin forcement tragique.
Vengeance est donc un film plus complexe qu’il ne le parait au premier abord. Alternant des scènes de fusillades et des moments plus intimistes, voire franchement touchants, le film réserve de belles surprises. Comme cette scène de combat étonnante où le trio de tueurs voit rouler vers eux des cubes d’ordures compressés pousser par des dizaines d’assaillants. Ou la reconstitution du massacre dans la maison qui alterne les scènes de meurtre passées et ce qu’en imaginent les trois tueurs. Ou bien encore cette étrange et fraternelle amitié qui se lie entre ces tueurs à gages et un vieil homme qui veut se venger avant d’oublier ce pour quoi il est ici.
Il faut toute la maitrise et la foi d’un cinéaste comme Johnnie To pour ne pas faire basculer le film dans le ridicule. La frontière est mince et l’anachronisme d’un Johnny Halliday fatigué, décalé et finalement touchant parmi les gangsters chinois aurait facilement pu prêter à rire. Il n’en est rien, Vengeance est un film efficace, une réflexion intéressante et au final un pari risqué mais gagné.

Aucun commentaire: