samedi 18 juillet 2015

Love

Love aurait pu être un bon film, un très bon film même. Car la note d’intention du réalisateur trublion, réaliser un film d’amour à forte connotation sexuelle, est fort louable. 
Prenant le contre-pied de la plupart des histoires d’amour qui jettent un voile pudique sur les relations sexuelles des protagonistes, qui sont tout de même une composante essentielle d’une relation de couple, ou bien les films ouvertement explicites sur le sexe, dont le porno traditionnel est le représentant le plus répandu, et qui évacuent quasi systématiquement tout sentiment, Gaspar Noé proclamait haut et fort depuis plusieurs années qu’il allait mettre un bon coup de pied dans la fourmilière et nous proposer enfin un vrai film d’amour ET de sexe. 
Alors oui, du sexe il y en a dans Love. Simulé ou non, cadré serré ou en plan large, à deux, trois ou beaucoup plus, il y en a même tellement dans la seconde partie du film que l’on ne sait plus où donner de la tête. Les scènes de coït se succèdent les unes aux autres, gagnant en fébrilité ce qu’elles perdent en tendresse. Car c’est bien là que réside le handicap de Love : l’absence de tendresse, d’amour, d’empathie avec des personnages que l’on aimerait aimer. 
Laissons de côté la vision pessimiste du couple que nous propose Gaspard Noé, là n’est pas le problème. Ce qui plombe le film, c’est en premier des personnages pour le moins antipathiques interprétés par des acteurs auxquels on ne parvient jamais à s’identifier. La palme revient certainement à Murphy, un américain de 25 ans apathique, gonflant, pour ne pas dire complètement abruti. Passant d’une amante sur laquelle il greffe tous ses fantasmes à une concubine à qui il fait un enfant par accident (thème qui revient d’ailleurs à plusieurs reprise au cours de l’histoire), Murphy passe son temps à pleurnicher sur son sort, se droguer, regretter le temps passé, se droguer, baiser pour oublier, se droguer, s’engueuler avec Electra et/ou Omi, se droguer. Bref, un jeune homme plein d’énergie à qui on a envie de mettre deux claques, voire plus si affinité. 
Autre souci, et non des moindres, la propension du réalisateur à se citer lui-même (les personnages filmés de dos, la maquette de l’immeuble sur la table de nuit renvoient directement à Enter the Void, le club échangiste qui n’aurait pas dépareillé dans irréversible), se répéter (la bite filmée depuis l’intérieur d’un vagin, c’est sympa une fois dans Enter the Void, ensuite ça devient lassant) et s’auto référencer (le fils de Murphy s’appelle Gaspar, l’ancien amant d’Electra se nomme Noé…). Bref, on frôle l’auto fellation à tel point que cela en devient gênant. 
Enlevons les scènes de sexe (qui soit dit en passant non rien de bien méchantes pour effaroucher autant de monde) et que reste-t-il ? Rien, ou pas grand-chose. Car d’amour, pas la moindre trace dans Love. Les personnages se croisent en se regardant le nombril, cherchant dans l’autre la matérialisation de ses propres fantasmes et la possibilité de flatter son égo. Ne parlons pas de la 3D que rien, si ce n’est un argument publicitaire de plus, ne justifie (sauf si vous appréciez une éjaculation faciale en relief). 
C’est d’autant plus dommage que Gaspar Noé a du talent, il le montre au détour de quelques plans (la scène d’amour à trois entre Murphy, Electra et Omi par exemple), suffisamment de culot pour oser s’aventurer là où les autres ne vont pas. Mais il ne faudrait pas oublier en route qu’un film, c’est avant tout une histoire, des personnages et la volonté profonde de toucher son public avant de satisfaire son propre égo. Ce que le réalisateur semble avoir oublié en route.

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