Le film de boxe, genre à part entière répondant à un certain nombre de règles et de passages obligés (victoire, chute, entrainement, rédemption) n’est jamais mieux représenté que lorsqu’il arrive à s’extraire de ces dogmes, à les transcender pour mieux se les approprier. Ce n’est pas le cas de La rage au ventre qui déroule sans surprise un scénario balisé sur lequel le spectateur un tant soit peu averti aura systématiquement dix minutes d’avance.
Plus à l’aise dans le film d’action que dans le drame familiale, Antoine Fuqua sort la grosse artillerie pour nous émouvoir et nous tirer quelques larmes entre deux combats de boxe pour le coup plutôt réussis. Tout y passe, de la disparition d’un être cher à la perte de tous ses biens matériels, des foyers sociaux à l’appartement crasseux, de la perte des amis à celle de sa fille, le pauvre Billy Hope se retrouve pris dans une tempête qui le dépasse et ne lui épargne rien. Il devra alors tout reconstruire pour prouver à la société (représentée par le juge) et à lui-même qu’il est capable de s’assumer en tant que père et adulte responsable. Le problème, c’est que l’on a le plus grand mal à y croire.
Les personnages sont taillés à la serpe, Jake Gyllenhaal sombre dans la performance à tout prix et le pourtant formidable en toutes circonstances Forest Whitaker a le plus grand mal à se sortir d’un rôle qui frôle la caricature, sinon le déjà vu. Les évènements se succèdent à une vitesse inimaginable (il se passe quelques semaines entre le drame et le match final), ne nous laissant pas le temps de nous attacher à des personnages trop lisses et policés malgré les efforts du réalisateur pour filmer un Billy Hope le regard bas et le visage constamment tuméfié. Jusqu’au final que l’on voit arriver à des lieues et qui vient couronner une morale si typiquement américaine qu’elle en devient gênante.
Antoine Fuqua a oublié en cours de route que, de Raging Bull à Rocky en passant par Million Dollars Baby, les plus beaux films de boxe mettaient en scène des perdants (sur ou en dehors du ring), plutôt que des champions que l’on ne sent jamais vraiment en danger. C’est d’autant plus dommage que le film décolle légèrement dans sa seconde partie, on en vient à s’intéresser à des personnages secondaires (l’assistante sociale Angela Rivera) qui ne seront malheureusement pas développés. Les matchs sont bien filmés mais le réalisateur passe à côté de son vrai sujet.
Comme l’annonce l’affiche du film, « son plus grand combat se joue hors du ring ». C’est loin d’être le plus intéressant pour le spectateur.
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