samedi 29 mars 2014

Captain America, le Soldat de l’Hiver

Tout en se plaçant dans la continuité de l’immense saga des adaptations Marvel sur grand écran planifiées pour les cinq ans à venir, Captain America, le Soldat de l’Hiver fait preuve d’une maturité jusque-là peu présente dans les films issus de l’univers Marvel. Alors que le premier volet des Avengers misait tout sur un côté spectaculaire totalement assumé et réussi, cette deuxième aventure consacrée au premier Vengeur se tourne clairement vers les grands thrillers politiques et paranoïaques des années soixante-dix. Trahisons, retournements de situation, faux semblants, réflexion politique, jusqu’à la présence de Robert Redford (Les hommes du président, les trois jours du Condor,…) qui semble vouloir ancrer l’histoire dans cet ambiance d’espionnage que l’on croyait éteinte avec la fin de la Guerre Froide. Mais si Steve Rogers est un pur produit de la fin de la Seconde Guerre Mondiale qui tente tant bien que mal de s’adapter à l’époque actuelle, les problématiques militaro politiques restent finalement les mêmes. Et c’est bien là l’une des forces du film, que de s’emparer de l’un des héros les plus droits, patriotes, pour ne pas dire psycho rigide de l’écurie Marvel, et de le faire se questionner sur le bien-fondé de ses actes et des ordres qu’il reçoit. 
Captain America, le Soldat de l’Hiver en profite au passage pour nous interpeller sur le positionnement d’une certaine partie de la classe politique américaine qui milite pour des frappes préventives et des guerres « justes » afin de protéger la sécurité de leurs concitoyens, quitte pour cela à sacrifier bon nombre d’innocents. On ne fait pas d’omelette sans casser des œufs, telle pourrait être la doctrine des dirigeants du SHIELD. Doctrine que refuse un Steve Rogers en plein doute quant à la cause qu’il sert. Le film réussit donc à marier la mythologie propre à Captain America (les personnages issus de son passé, la vrai nature du Soldat de l’Hiver) à un contexte on ne peut plus actuel (le mariage contre nature entre les complexes militaro industriels et les politiques). 
Mais que l’on se rassure tout de suite, le film ne sacrifie pas pour autant le spectacle pur au profit d’une introspection trop abyssale. Épaulé par une Veuve Noire que l’on n’avait jamais vu aussi présente et introduisant le personnage du Faucon, Captain America retrouve pour l’occasion un ennemi juré bien plus puissant que tout ce qu’il aurait pu imaginer. 
Malgré quelques scènes d’actions un peu brouillonnes, le film nous offre un spectacle impressionnant avec son lot de scènes d’anthologie et de personnages secondaires particulièrement bien campés, tout en nous proposant une réflexion bienvenue sur les limites d’une politique trop sécuritaire. Et bien entendu, les scènes post génériques introduisent comme le veut la tradition de multiples pistes pour les épisodes à venir. Captain America, le Soldat de l’Hiver réussi la parfaite alchimie du film de divertissement doté d’un scénario intelligent. Voilà qui devrait en rallier plus d’un à la cause des super héros !

jeudi 6 mars 2014

Alabama Monroe

On ne peut pas reprocher à Felix Van Groeningen de nous prendre par surprise. Avec sa structure chronologique éclatée, le réalisateur nous plonge dès le départ dans le cœur du drame qui se joue devant nous. Pas de faux suspens, on sait dès le début ce qui va se passer. Car Alabama Monroe déroule une histoire sinon banale du moins tristement classique. La rencontre d’un couple, l’arrivée d’un enfant, l’irruption de la mort, l’impossibilité d’un deuil trop lourd à porter et l’autodestruction de deux êtres meurtris. L’intérêt du film est ailleurs, et plus particulièrement dans ses personnages. 
En 2009, Felix Van Groeningen livrait déjà avec La merditure des choses la chronique à la fois tendre et amer d’une famille de marginaux hauts en couleur. En passant de la chronique sociale au drame familiale, il garde ce goût prononcé pour les personnages décalés, que ce soit physiquement (la chevelure hirsute de Didier, les tatouages d’Elise) ou psychologiquement (le côté punk de Didier, la fragilité d’Elise). En déconstruisant son film d’un point de vue narratif, en nous dévoilant dès le début les drames à venir, le réalisateur nous force à nous détacher de l’histoire pour nous concentrer sur cette famille en train d’imploser. 
S’il ne nous épargne rien du calvaire tant physique que morale des personnages, Felix Van Groeningen met tout son talent pour filmer avec délicatesse des moments de grâce qui donnent au film toute sa force. Comme le groupe de musicien qui interprète de façon prémonitoire Le lion est mort ce soir pour le retour de Maybelle à la maison, le dernier concert de Didier et Elise où, incapable de se parler, ils communiquent par la musique et au travers de gestes aussi insignifiant qu’une main posée sur un ventre ou un regard qui cherche l’autre sans jamais le trouver. Comme ces tatouages qui racontent la vie d’Elise sur son corps, remplaçant les discours revendicatifs de Didier, en colère contre la société, la religion et cette Amérique qu’il admire tant. Comme la mort d’un enfant et le deuil impossible, le vide d’Elise et la rage de Didier, les consumant chacun à leur tour. Comme cet oiseau mort qui se change en étoile ou cet ultime récital autour d’un lit de mort qui vient clore le film.
Merveilleusement interprété par Johan Heldenbergh (déjà présent dans La merditude des choses) et la belle Veerle Baetens, Alabama Monroe nous prend aux tripes et au cœur pour ne plus nous lâcher jusqu’au générique de fin, accompagné par cette belle musique à la fois entrainante et d’une tristesse sans nom, comme ce film rare et précieux. On en ressort avec le besoin pressant d’aller embrasser nos enfants, notre femme ou notre mari, en leur disant combien on les aime, avant qu’il ne soit trop tard.

vendredi 21 février 2014

Les brasiers de la colère


Les brasiers de la colère fait partie de ces films qui, dans la lignée de Winter Bones, mêlent étroitement chronique sociale et thriller en accordant un soin tout particulier à ses personnages. Car si le film fait la part belle à une nature grandiose et des paysages citadins grisâtres, ce sont bien vers les protagonistes du film que converge toute l’attention du réalisateur. Porté par un casting exceptionnel de vrais gueules (tous les acteurs sont choisis et dirigés impeccablement), le film brosse le portrait aride et sans fard d’une communauté de personnes qui survivent comme elles le peuvent à la veille de l’élection d’Obama dans une Amérique plus que jamais inégalitaire avec son lot de laissés pour compte et de marginaux. Quelque soit la voie qu’ils prennent (l’usine, l’armée, la drogue, la police,…), chacun sera amené à assumer ses choix et à supporter toutes les conséquences de ses actes. Et elles seront parfois très lourdes.
Si Scott Cooper cède parfois à quelques facilités (l’attaque de la maison où est sensé se trouver le dealer, le parallèle entre la partie de chasse au cerf et à l’homme), il fait toutefois preuve d’un vrai sens de la mise en scène avec une capacité à raconter une tranche de vie en quelques plans. Il suffit de voir Russell Baze à l’usine, avec son frère où pendant quelques minutes avec sa petite amie pour cerner le personnage, aidé il est vrai par une interprétation au cordeau de Christian Bale toujours bien entouré.
Alors que l’histoire aurait pu commencer à sa sortie de prison et se concentrer sur la dernière partie du drame, résumant ainsi l’intrigue à son strict minimum, le réalisateur prend au contraire le temps de raconter son histoire du début à la fin. Nous vivons avec les deux frères avant les drames qui vont les séparer et changer leur vie à jamais, nous les suivons, parfois de façon elliptique, tout au long de leur vie jusqu’à un final dont on peut discuter la morale mais qui reste en cohérence avec la noirceur ambiante du film.
Car Scott Cooper ne fait aucune concession scénaristique. Evitant les scènes larmoyantes et un misérabilisme facile, il plonge néanmoins ses protagonistes dans une misère aussi bien sociale qu’affective qui fait du film bien plus qu’une énième histoire de vengeance filiale. Les brasiers de la colère parle de ces milliers de personnes oubliées par le rêve américain, de ces laissés pour compte qui ne peuvent compter que sur eux même pour s’en sortir. C’est rude, inconfortable mais aussi puissant et salutaire.

samedi 15 février 2014

Les voleurs de vie (nouvelle)

« Anatomie du cauchemar » est un recueil de 13 histoires d’horreur réunissant les nouveaux auteurs français du genre. De la terreur psychologique à l’horreur fantastique en passant par la parodie, tous les grands thèmes du genre sont explorés dans cette anthologie. 13 histoires aux univers différents, 13 auteurs au style unique.

 Les voleurs de vie (Christophe Semont) : Un commando militaire envoyé dans les profondeurs de la jungle mexicaine pour traquer des narcotrafiquants y feront une découverte extraordinaire. Et fatale.    
Publié chez House Made of Dawn
http://housemadeofdawn.com/anatomie-du-cauchemar/  

Où l'acheter ? 
http://www.amazon.fr/Anatomie-du-cauchemar-Coulon-Miserque-ebook/dp/B00FPDYD5A  

Ce qu'en pensent les lecteurs : 

Commentaires Amazon : 

 29 octobre 2013 Par Reader N°28394 Très varié malgré une thématique probablement usée jusqu'au cordon, ce recueil de nouvelles nous amène successivement dans les tréfonds d'une mine, dans les profondeurs de la jungle mexicaine, dans un délicieux pastiche de lovecraft, dans la chaleur d'un dester de western, etc. Les styles, les thèmes et les trouvailles s'enchainent et explorent finalement bien d’autres émotions que la simple et seule terreur. Les textes sont pour la plupart de qualité et les illustrations sont très originales. Très bon livre ! 

29 octobre 2013 Par Salyna Les voleurs de vie : La meilleure nouvelle de cette anthologie selon moi. Tous les ingrédients pour flipper sont réunis : un lieu effrayant et mystérieux, une mission militaire et des animaux morts bizarrement…. Bref, très rapidement, la tension monte et l’angoisse arrive à toute vitesse. Et merci à l’auteur d’avoir pris la peine de mettre 2 femmes dans son lot de soldats. Rien ne l’y obligeait, mais il a fait cet effort. Vraiment une très bonne nouvelle, et cela me rappellent une histoire vraie raconter par un chirurgien en…. Les voleurs de vie ne sont peut-être pas qu’une légende… 

 2 novembre 2013 Par Cinzano « Les voleurs de vie » de Christophe Semont Ça démarre avec l’ambiance d’un « Relic » de Preston & Child, se poursuit comme un bon « Predator » des familles et s’achève en horreur absolue. Les codes du genre sont exploités avec brio, ce qui engendre une montée graduelle de la terreur et quelques poussées d’adrénaline pour maintenir le lecteur éveillé. Une maîtrise de la tension assez bluffante avec ces détails qui s’enchaînent et qui n’ont pour seul but que de nous happer, nous engloutir sous les frondaisons de cette inquiétante jungle. 

 Critiques : 

http://laurentpendarias.com/2013/09/chronique-n%C2%B019-anatomie-du-cauchemar/ 

Les voleurs de vie de Christophe Semont Expédition dans une jungle latine. Le décor et l’équipe me faisaient beaucoup penser au premier Predator, Schwarzenegger en moins. J’ai bien aimé cette nouvelle. Pour une fois, les humains réagissent au lieu d’attendre bêtement de se faire décimer par les monstres. On est plus dans le récit d’aventure.

 http://voiretmanger.fr/anatomie-du-cauchemar/
Dans un tout autre genre, « Les voleurs de vie » de Christophe Semont est une nouvelle très réussie également, peut-être parce qu’elle prend le temps d’installer son histoire de fond de jungle. 

 http://www.fantastinet.com/anatomie-du-cauchemar-anthologie/ 
Les Voleurs de vie de Christophe Semont : Antonio Guajardo va mourir. C’est ce qu’il nous annonce, d’emblée. Et la suite de la nouvelle, qui va nous emmener sur des terres encore inconnues, n’est que sa longue descente aux enfers, nous faisant découvrir un univers que nous ne suspectons bien entendu pas ; la peur se trouve à chaque ligne et nous nous inquiétons du devenir de ce professeur, appelé au secours par l’armée. 

http://francoisegrenierdroesch.over-blog.com/article-anatomie-d-un-cauchemar-des-editions-121074508.html 
"Les voleurs de vie" de Christophe Semont. Un délice, cette immersion en terrain hostile. L'ambiance de terreur est extrêmement bien rendu et cerise sur le gâteau, il y a de vrais monstres d'un genre nouveau, sauvages et redoutables. L'équipe qui encadre le spécialiste des indiens dans cette forêt "Amazonienne" est tout à fait crédible. Les personnages sont bien campés. Rien n'est de trop ! Et la fin est vraiment inattendue. 

http://housemadeofdawn.com/anatomie-du-cauchemar/ 
Si on aime l’horreur, on devrait acheter cette anthologie. Ca faisait longtemps que je n’étais pas tombé sur une belle sélection comme ça. Le niveau est bon, les styles variés et les illustrations de toute beauté. Dommage qu’il n’y ait pas de version papier… mais cette version numérique est bien réalisée, ça passe nickel sur ma Kobo. Ps : j’ai adoré l’histoire qui se passe dans la Chiapas “Les voleurs de vie ” de Semont, un auteur à suivre, assurément.

jeudi 13 février 2014

12 Years a Slave

12 Years a Slave fait partie de ces films qu’il faudrait inscrire dans les programmes scolaires au côté de La liste de Schindler tant il nous plonge sans artifice dans la réalité glaçante de ce qu’était l’esclavagisme peu avant la Guerre de Sécession aux États Unis. 
Sans se départir d’un sens aigu de la mise en scène et d’une direction d’acteurs au cordeau, Steeve McQueen filme de manière quasi documentaire la triste histoire de Salomon Northup, homme libre de couleur noire qui fut kidnappé et vendu en tant qu’esclave. Il restera douze ans privé de liberté, passant d’un maitre à l’autre avant d’être finalement libéré et de pouvoir témoigner sur l’enfer qu’il a traversé. 
Renonçant à toute histoire d’amour ou d’amitié qui parasiterait son propos, le réalisateur se concentre sur la condition des noirs à cette époque et ne fait pas de Salomon un héros plus grand qu’il ne l’est. Car tant qu’il est libre, ce père de famille ne se soucie pas outre mesure du sort ignoble réservé à ses frères de couleurs. Originaire de l’État de New York, il vit loin du Sud esclavagiste, partagé entre sa famille et son violon, et n’a qu’une lointaine idée de ce qui se passe dans les plantations. Il faudra qu’il soit lui-même réduit à l’esclavage pour appréhender pleinement l’injustice et l’ignominie de ce système. Et là encore, quand il quitte son dernier maitre et laisse derrière lui les rares personnes avec lesquelles il a tissé quelques liens, il n’a pas l’ombre d’une hésitation. 
Salomon est profondément humain, avec ce que cela comporte comme faiblesse, lâcheté et mesquinerie, et c’est ce qui fait la force de ce film éprouvant. Car comme toutes les situations extrêmes, les systèmes concentrationnaires ou les négations de la nature même de la condition humaine, ces contextes sont sujets à révéler les hommes et femmes dans ce qu’ils sont au plus profonds d’eux-mêmes. Il en ressort quelques authentiques héros et un nombre beaucoup plus grand de malades, frustrés, sadiques qui voient dans ces situations l’occasion de laisser libre cours à leurs plus bas instincts. 
12 Years a Slave met admirablement bien en exergue une galerie de personnages tous plus tordus les uns que les autres. Du maitre compatissant qui refuse de voir la réalité de ce qu’il fait au tortionnaire réellement dérangé, du compagnon qui vous tourne le dos dès qu’une occasion de sortir de ce bourbier se présente à celui qui vous trahi à la moindre occasion, tous sont campé par des interprètes au mieux de leur forme et dirigé d’une main de maitre par un réalisateur plus que jamais obnubilé par les méandres de l’âme humaine et les corps torturés. 
12 Years a Slave était donc un sujet en or pour Steve McQueen qui le transcende sans jamais tomber dans le piège du parti pris et sans s’éloigner un seul moment de son sujet. On en ressort choqué, mal à l’aise, pas tant par le film que par une réalité historique qu’il nous jette au visage et que l’on n’avait jamais appréhendée avec autant de violence.

samedi 1 février 2014

Nymphomaniac – Volume 2

Dans la première partie de Nymphomaniac, Lars von Trier nous prenait par la main pour nous emmener sur les traces de Joe, une jeune fille autoproclamée nymphomane et multipliant les conquêtes pour essayer de combler un vide qui l’aspire inexorablement. Dans ce second volet, le réalisateur nous lâche dans une zone aussi extrême qu’inconfortable. Un endroit où la douleur se mêle au plaisir, où le sexe se mélange aux coups et à la mortification. On se retrouve seul face à des personnages torturés nous renvoyant à nos pires démons. 
Cabossée, meurtrie, Joe continue à raconter l’histoire de sa vie à Seligman dont les digressions à première vue hors sujet illustrent les sujets les plus chers au réalisateur. Dans le volume 1, Lars von Trier filmait ses personnages avec empathie, provocant des émotions aussi diverses que puissantes chez le spectateur. Ici, le réalisateur observe ses sujets avec l’œil d’un entomologiste. Le sexe ne procure plus aucun plaisir qu’il faut aller chercher ailleurs. Joe, interprété par Charlotte Gainsbourg dans la deuxième partie de sa vie, s’enfonce de plus en plus profondément dans les affres d’une quête qui ne peut la mener nulle part. 
Comme pour les précédents films de Lars von Trier, Nymphomaniac est une véritable catharsis pour son réalisateur. Il va même jusqu’à reproduire presque plan par plan la scène d’Antéchrist où le petit garçon livré à lui-même se dirige vers un danger potentiel pendant que sa mère part en quête de plaisir sexuel. Le sexe, le poids du péché originel porté par les femmes, la religion rédemptrice ou au contraire punitive, l’essentiel de ce qui constitue les obsessions du réalisateur sont là, résumées en une femme qui se livre, non pas physiquement mais en mettant son âme à nue, à un homme qui l’écoute sans la juger. 
En clôturant son film fleuve par une dernière scène d’une noirceur absolue qui plonge les personnages et les spectateurs dans les abimes jusqu’ici seulement entre ouverts, Lars von Trier assène son message avec force et obstination. Il n’y a pas d’espoir ni de rédemption possible, ni dans le sexe, ni dans la nature humaine. 
Froid et provocateur, Nymphomaniac volume 2 n’est pas un film aimable, l’objectif de Lars von Trier n’est pas de caresser le spectateur dans le sens du poil, loin de là. On en ressort secoué, bousculé, mal à l’aise, ne sachant pas si l’on a aimé ou pas. Ne serait-ce pas l’essence même du cinéma ?

samedi 25 janvier 2014

Dario Argento’s Dracula

Bon, d’accord, cela fait de nombreuses années que Dario Argento n’est plus que l’ombre de lui-même et qu’il frôle le ridicule (nombreux sont ceux qui pensent qu’il a franchi la ligne rouge depuis longtemps) à chaque nouveau film, se caricaturant sans jamais parvenir à renouer avec le génie qui fit de lui l’un des cinéastes les plus intéressants de ces vingt dernières années. Et ce n’est pas cette nouvelle version de Dracula en 3D qui nous fera dire le contraire. 
Désespérément long, assez mal interprété (Rutger Hauer fait vraiment le minimum syndicale dans le rôle d’Abraham VanHelsing), écrit avec les pieds, parfois franchement ridicule (cette apparition de Dracula en mante religieuse géante, il fallait oser tout de même), le film apporte encore un peu plus d’eau au moulin des détracteurs de plus en plus nombreux de l’un des maitres du giallo. 
Ceci étant dit, comme dans le tant décrié Mother of Tears, tout n’est pas à jeter dans ce Dario Argento’s Dracula qui renferme de petites pépites pour qui prendra la peine d’aller les chercher. 
Le film commence sur les chapeaux de roues avec une scène joliment érotique qui nous renvoie directement aux productions fauchées d’un Jean Rollin (on s’attend presque à voir débarquer Brigitte Lahaie dans la grange où s’ébattent les deux amants), voire, et j’assume la comparaison, aux productions Hammer. Nous sommes dans un petit village sur lequel plane une menace pour le moment invisible. Tous les villageois sont terrifiés et se cloitrent dans leur maison. Sauf une jolie jeune fille qui ne trouve rien de mieux que d’aller rejoindre son fiancé qui d’ailleurs la laissera rentrer seule en pleine nuit, avec les conséquences que l’on devine. Le décor est planté, tout cela est délicieusement suranné et en tout cas bien plus appréciable que les relectures épileptiques des grands mythes fantastiques (Van Helsing, I Frankenstein,…). 
Si encore une fois l’ensemble manque cruellement de cohérence et d’un minimum de rythme, on n’en appréciera que plus quelques scènes diablement efficaces comme celle où le comte Dracula règle ses comptes avec les villageois en train de comploter contre lui. Ne pouvant comme à son habitude pas s’empêcher de filmer sa fille dans le plus simple appareil, Dario Argento choisit en plus pour le rôle de Mina Harker l’actrice Marta Gastini qui lui ressemble comme deux gouttes d’eau, avec quelques années de moins. 
Quelques scènes érotiques, des effets gores en quantité raisonnables, une atmosphère qui nous renvoie aux meilleurs films de studios des années soixante-dix, cela suffit-il pour faire un film honnête ? Surement pas, mais c’est en tout cas suffisant pour ne pas lyncher celui qui nous a tant fait rêver quand il était au sommet de sa gloire.