Des
corps en mouvement au son d’une musique techno, l’étendu désertique du désert
marocain avec pour seul horizon un mur d’enceintes. Et puis de cette masse
extatique émergent des corps et des visages atypiques.
La caméra capte la vibration
des basses et suit ces personnages que nous ne lâcherons plus. Louis accompagné
par son fils Estéban et cette communauté de teufers qui va les accueillir bien
malgré eux. Bigui, Stef, Josh, Tonin et Jade, tous embarqués dans une fuite en
avant, un voyage sans retour possible aux confins d’un monde au bord du
précipice, une dernière danse pour se sentir vivant avant le grand saut vers l’inconnu.
Car au-delà de sa volonté évidente de capter l’insaisissable, la musique, la vibration
des corps et cette volonté désespérée d’exister une dernière fois, Sirat ne
parle de rien d’autre que d’une fuite devant une guerre généralisée qui ne sera
jamais nommée, une société où les cabossés et les infirmes n’ont pas leur
place, et où l’être aimé manquera toujours à l’appel. Et même si l’on danse, on
fume, on boit et on s’aime, la fête a un goût de cendre et laissera bientôt
place à la douleur et à la mort.
Le film bascule brutalement lors d’une scène
traumatisante pour ne plus jamais lâcher le spectateur et maintenir une tension
qui ramène au mythique Sorcerer de William Friedkin. Et ce n’est pas le seul
point commun entre le film d’Olivier Laxe et le remake du salaire de la peur.
Au-delà
d’une similarité évidente, un convoi de camions confrontés à une nature hostile
sur un parcours semé d’embûches, Sirat et Sorcerer partagent également une
morbidité et une tragédie de fin du monde qui en font des œuvres aussi marquantes
qu’inclassables.
Bien qu’imperceptible, la mort demeure omniprésente dés les
premières scènes du film avec ces corps aux mouvements saccadés et mécaniques
et cet homme en quête de son enfant dont nous ne percevrons qu’une série de
photos, véritable Orphée traversant les Enfers et ne comprenant que bien tard
le prix à payer pour sa quête.
Sirat se vit et se ressent pleinement une fois
le film terminé, quand les images refont surface et que l’on se demande si l’on
vient d’assister à une ode à la vie envers et contre tout ou au contraire au
chant du cygne d’une humanité acculée dans ses derniers retranchements. Quoiqu’il
en soit on n’en ressort pas indemne.
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