samedi 21 septembre 2013

Riddick


La logique aurait voulu que le troisième volet des aventures de Riddick narre son accession au trône à la tête des Necromongers, prolongeant ainsi le faste du deuxième épisode. Mais le relatif échec commercial des Chroniques de Riddick incite les producteurs à davantage de prudence, et c’est vers la sobriété Pitch Black que lorgne ce troisième opus. Nous retrouvons donc notre guerrier dur à cuir laissé pour mort sur une planète pour le moins hostile. Est-ce le poids des années, mais en effet les premières minutes nous montre un Riddick plus malmené que d’habitude, blessé et traqué par une faune aussi agressive qu’exotique. Préférant affronter des hordes de mercenaires plutôt que les monstres qui l’environnent, il déclenche une balise de détresse, attirant à lui une bonne dizaine de chasseurs de primes prêts à tout pour ramener sa tête dans une boite. Riddick se déroule en deux temps. La première partie du film se concentre sur l’aspect survival, confrontant Riddick à toute une série d’épreuves plus mortelles les unes que les autres. Vulnérable en temps qu’homme, il va chercher en lui sa part d’animalité pour affronter les créatures monstrueuses qui ne pensent qu’à le dévorer. Cette traversée du désert centrée sur le seul personnage de Riddick est ponctuée par des flashes back en connexion directe avec l’épisode précédent, nous apprenant pourquoi et comment il a atterri sur cette planète inhospitalière.
Viennent ensuite les mercenaires et le film suit alors plus ou moins la trame de Pitch Black, retombant dans un schéma plus classique. Opérant un salutaire retour aux sources par rapport aux Chroniques de Riddick, le film affiche de multiples influences clairement revendiquées et toutes plus honorables les unes que les autres.
Le cheminement de Riddick, guerrier quasiment invincible qui accède au trône après avoir défié tout un royaume n’est pas sans rappeler le destin de Conan. De même, les créatures aquatiques qui représentent la plus grande menace sur une planète qui n’en manque pas renvoient assez directement à Aliens, alors que les mercenaires lancés aux trousses du héros ne sont pas sans rappeler ceux d’Alien, la résurrection.
Fort de ces modèles, Riddick s’impose comme une fort sympathique série B décomplexée, n’hésitant pas à afficher quelques poitrines féminines et des effets gores du plus bel effet. Humour de caserne, répliques testostéronées, affrontements brutaux, tout est réuni pour que le spectacle soit au rendez vous. On n’en ressort pas grandi certes, mais avec l’impression d’en avoir eu pour son argent, ce qui est déjà beaucoup.

dimanche 8 septembre 2013

You're Next


Auréolé d’une réputation flatteuse glanée dans de multiples festivals, You’re Next s’avère au final plus malin que franchement original. Simon Barett qui a écrit le scénario a bien retenu les leçons des grands classiques dont il s’inspire, et c’est toute la structure du film qui en découle. Calqué sur le jeu de massacre de la Baie sanglante de Mario Bava, le film se clôt sur une pirouette tout droit sortie de la Nuit des Morts Vivants de Georges Romero. Mais entre temps, ce sont les principaux slashers des années quatre vingt qui sont passés en revu. L’histoire suit une famille qui se réunit dans une maison isolée pour un anniversaire de mariage. Alors que l’atmosphère tourne au règlement de compte entre frères et sœurs (et là on pense à Festen et à son grand déballage de rancœurs enfouies), ils sont attaqués par un groupe de psychopathes masqués qui semblent bien décidés à tous les tuer. Mais l’un des invités va se révéler plus coriace que prévu.
Illustrant encore une fois le thème du home invasion qui semble revenir en vogue, You’re Next prend le contre pied du récent American Nightmare. Ce dernier illustrait de façon assez plate un scénario aux ramifications politiques intéressantes. Ici, l’histoire ne réserve que peu de surprise pour le spectateur habitué aux films d’horreur, mais l’ensemble bénéficie d’une solide réalisation qui donne à l’histoire une vraie cohésion.
Et nous voilà parti pour une heure trente qui revisite les grandes figures des tueurs en série. Quand un tueur rode à l’extérieur ou à l’intérieur même de la maison, et qu’un masque blanc apparait dans le reflet d’une vitre, il est difficile de ne pas penser immédiatement à Halloween. De même, l’usage intensif des instruments ménagers les plus divers pour tuer son prochain ainsi que l’image d’une machette plantée en pleine tête renvoient directement à Vendredi Treize. Mais là où les tueurs en question ne cessent de mourir pour mieux revenir au détour d’un couloir obscur, les mises à morts brutales de You’re Next sont définitives, et c’est l’un des grands mérites du réalisateur de ne pas tomber dans le piège du tueur qui n’en fini pas de ne pas mourir. Quand une victime (ou un bourreau) se fait défoncer le crâne à coup de marteau, c’est définitif et sans appel. Ce souci de réalisme, si l’on peut dire, crédibilise le film et nous tient d’autant plus en haleine quand au sort des protagonistes restant en vie. Il est d’ailleurs assez remarquable de constater que les personnages de You’re Next s’en prennent plein la tête, au sens premier du terme. Adam Wingard semble prendre un malin plaisir à voir le crâne de ses protagonistes se faire exploser de façon aussi diverses que violentes. Marteau, mixer, hache, gourdin, tout y passe.
Abandonnant l’habituel groupe de victimes teenagers, le réalisateur préfère se concentrer sur la cellule familiale assaillie par une menace extérieure, et là encore l’impact n’en est que plus fort. You’re Next est intriguant dans sa première partie, un peu décevant lorsque les masques tombent, au propre comme au figuré, et que les clefs de l’intrigue nous sont révélées. Le final est prévisible mais l’ensemble est suffisamment maitrisé pour que l’on s’embarque avec plaisir dans cette partie de massacre réjouissante à plus d’un titre. D’autant plus que le personnage principal est interprété par Sharni Vinson, aussi charmante que convaincante dans un rôle qui aurait pu être casse gueule, et que le réalisateur a eu la bonne idée de confier le rôle de la mère à la grande et trop rare Barbara Crampton. Une apparition trop brève mais qui justifierait à elle seule la vision du film.

vendredi 23 août 2013

Conjuring – Les dossiers Warren


James Wan a bien compris que c’est dans les vieilles marmites que l’on fait les meilleures soupes, et qu’il n’est nul besoin de 3D ou de fond footage pour faire sursauter les spectateurs. Reprenant la même veine qu’Insidious, une épouvante à l’ancienne, il livre avec The Conjuring un film encore plus effrayant, ce qui n’est pas peu dire. Cette fois, le réalisateur opte pour une trame plus classique si l’on peut dire. Pas de monde parallèle hanté par des esprits maléfiques, mais l’une des affaires résolues par le célèbre couple Warren qu’il remet sur le devant de la scène. Ed est démonologue, Lorraine est médium. Leur métier consiste à venir en aide aux personnes confrontées à des phénomènes paranormaux. En croisant la route de la famille Perron, ils vont devoir faire face à un véritable catalogue de ce qui se fait de plus effrayant en termes de surnaturel. Maison hantée, possession, exorcisme, malédiction, sorcellerie, tout ou presque y passe sans pour autant que le film ne sombre dans l’étalage gratuit d’effets chocs.
Car au gré d’une filmographie de plus en plus impressionnante, James Wan démontre qu’il est un réalisateur maitrisant parfaitement les mécanismes de la peur.
Premièrement, il sait s’entourer d’une solide équipe d’interprètes. Vera Farmiga impose une personnalité forte avec une impressionnante économie de moyen, Patrick Wilson déjà présent dans Insidious est parfait dans le rôle du démonologue inquiet pour sa femme, quand à Lili Taylor, (SPOILER) elle passe de la mère de famille protectrice à la femme possédée par l’esprit de la sorcière avec une déconcertante facilité (fin du SPOILER).
James Wan sait aussi manier avec parcimonie les ressors les plus efficaces d’un film d’épouvante. Après un prologue qui nous met tout de suite dans le bain, il fait monter la tension en jouant sur des effets mille fois vus au cinéma (portes qui grincent, température qui chute, cadres qui se décrochent du mur, apparitions furtives,…) en gardant à l’esprit que moins on en montre et plus l’effet est réussi. Il utilise une fois encore la musique comme un élément de tension à part entière, jusqu’au score finale dont les violons grinçants nous accompagnent bien après la fin du film.
En jouant le parallèle entre les familles Warren et Perron qui se verront confrontées au même danger, le réalisateur diversifient les points de vue, plaçant toujours le spectateur au même niveau que ses personnages, décuplant ainsi l’effroi ressenti par les acteurs du drame qui se joue devant nos yeux.
Riches en scènes fortes particulièrement réussies (l’exorcisme, les apparitions des spectres), The Conjuring réussi le pari audacieux de nous flanquer une trouille monstre. C’est rare et c’est bon.

lundi 19 août 2013

Kick-Ass 2


La première adaptation du comics de John Romita Jr et Mark Millar proposait une mise en abime intéressante de la condition de super héros, doublé d’une comédie d’action au second degrés réjouissant. Ce deuxième volet fait la part belle au spectacle débridé, oubliant au passage l’aspect introspectif qui caractérisait la franchise. Certes, on retrouve le thème de la figure paternelle sacrifiée pour permettre aux adolescents d’accéder à l’âge adulte, et surtout celui de la dualité des super héros avec cette question essentielle : qui du costume ou de l’homme ou la femme qui le porte est le plus important dans le statu héroïque ? L’histoire se passe tout de suite après les évènements relatés dans le premier épisode. Kick Ass a fait des émules et ce sont désormais des dizaines de citoyens ordinaires qui revêtent le costume de super héros pour la plupart assez improbables pour faire régner l’ordre. Mais entre l’image du super héros et la réalité de la rue, il y a un pas qu’il est parfois douloureux de franchir. Et c’est bien d’image dont il est question ici, relayée par les réseaux sociaux et sans laquelle les justiciers ou super vilains ne sauraient exister.
De ce point de vue, Kick-Ass 2 est connecté à son époque, Twitter, Youtube ou Facebook remplaçant les journaux qui naguère relayaient les exploits de Spiderman ou Superman. Mais la réflexion s’arrête là. Le film prend le parti d’une comédie décomplexée ne reculant devant aucune limite (seul l’aspect sexuel n’est pas vraiment explicite) pour illustrer les exploits de ses protagonistes souvent plus ridicules que tragiques, tout en étant dangereux, pour eux même comme pour leurs proches.
Dans un paysage cinématographique souvent frileux, il est bon de voir un film assez grand public, classé PG 13 et non pas R, débiter autant d’injures et montrer une violence, certes cartoonesque, mais la plupart du temps frontale. Car les coups portent dans Kick-Ass 2, le sang gicle et les combats n’ont rien à envier aux derniers films d’actions sortis sur les écrans.
Si le personnage de Kick Ass reste central, ce sont pourtant ceux de Hit Girl et Motherfuker qui assure le spectacle. Quand Mindy enfile son costume, on est sur d’assister à une scène de baston titanesque et particulièrement bien chorégraphiée. Quand à Chris D’Amico, en passant de Red Mist à Motherfuker, il ne fait que décupler son potentiel de méchanceté qui n’a d’égal que sa bêtise et le plaisir que l’on a de le voir apparaitre à l’écran.
Ne se prenant pas au sérieux, jouant avec bonheur d’une distanciation vis-à-vis de ses personnages et d’un second degré qui reste la marque de fabrique de la série, Kick-Ass 2 est un méchant coup de pied dans les testicules des comédies actuellement en vigueur. Jusque boutiste, frôlant parfois la vulgarité sans jamais franchement y tomber, et cela jusque dans le plan post générique, le film ose être incorrect, voire irrévérencieux sans pour autant sacrifier le spectacle qu’il nous offre.
Alors certes, nous ne sommes pas dans une profonde réflexion sur la notion de justice, ni dans une introspection pour déterminer si l’habit fait le moine ou le contraire. Kick-Ass 2 est violent, drôle, efficace, grossier, en un mot jubilatoire.

samedi 17 août 2013

Elysium


On peut dire beaucoup de choses du cinéma de Neill Blomkamp, mais on ne peut pas lui reprocher de manquer de cohérence, que ce soit sur le fond ou la forme. En effet, dès les premières images, Elysium nous renvoie à District 9 avec cette esthétique si caractéristique d’une Terre dévastée, rongée par la rouille et croulant sous la crasse. D’un point de vue thématique, nous sommes aussi en terrain connu. Il n’est pas question ici d’une allégorie de l’Apartheid avec des aliens mis au banc de la société, mais de deux mondes, celui des pauvres cantonnés sur Terre et des riches réfugiés sur la station orbitale Elysium. Le réalisateur poursuit donc sa dénonciation des inégalités actuelles ou à venir avec largement plus de moyens que lors de son premier film, pour un résultat en demi teinte. La planète Terre décrite dans le film est toujours crédible, Neill Blomkamp jouant avec les codes des véhicules et des armes existantes pour mieux les détourner et créer un monde futuriste criant de réalisme. Toujours passionné par les armes les plus meurtrières, il nous fait la démonstration qu’une science fiction grand public n’a pas à systématiquement sacrifier son âme au politiquement correct comme ce fut le cas pour Oblivion.
Ici, les corps explosent sous les déflagrations de charges explosives, la chair se mêle à l’acier sous forme d’exo squelettes (la scène de l’opération est à ce titre représentative de l’ambiance du film, sale et douloureuse), les milices policières robotisées répriment aveuglément toute tentative de rébellion tandis que l’administration est représentée par des robots hermétiques au moindre échange d’opinion (belle métaphore soit dit en passant).
Bref, la Terre décrite dans le film n’est pas un havre de paix, contrairement au monde d’Elysium où tout n’est que calme, luxe et volupté. Jusqu’à ce que les rouages se grippent et que les pauvres fassent irruption chez les riches, apportant avec eux le chaos ou l’espoir, selon le coté où l’on se place. Dans sa seconde partie, Elysium n’est d‘ailleurs pas sans rappeler Demolition Man quand les chasseurs de primes se mettent en tête de prendre le contrôle de la station. Il faut voir avec quelle délectation le réalisateur leur fait balancer des grenades parmi les yuppies effarés devant tant de barbarie, c’est à une véritable catharsis qu’il nous convie, non sans y ajouter un certain humour grinçant.
Tout cela aurait pu donner un film coup de poing, dans la droite ligne de District 9. Mais vu le budget du film, Elysium ne pouvait pas non plus être un film totalement punk. Alors il y a Matt Damon, certainement trop gentil garçon pour la rugosité nécessaire à son rôle, des flash back aux couleurs sépias répétitifs, des passages obligés se voulant émouvants avec des enfants. Sans compter quelques incongruités scénaristiques, dont celle qui voit les mercenaires embarquer l’héroïne et sa fille dans leur vaisseau pour des raisons aussi obscures qu’inexpliquées, comme ce fut le cas avec Loïs Lane dans Man of Steel. Si les séquences de fusillades et de guerre urbaine sont parfaitement maitrisées, on ne peut pas en dire de même des scènes de combat au corps à corps, encore une fois peu lisibles car filmées la plupart du temps caméra à l’épaule.
Elysium n’a donc pas la force de District 9 malgré quelques milliers de dollars en plus. Il n’en demeure pas moins un film maitrisé et intéressant, et une pierre de plus dans la filmographie de Neill Blomkamp qui n’a surement pas fini de nous surprendre.

jeudi 8 août 2013

American Nightmare


Le pitch de départ d’American Nightmare est intéressant à plus d’un titre. D’un un futur (très) proche, les Etats Unis connaissent une vague de criminalité sans précédent. Pour endiguer ce flot de violence et le canaliser, le gouvernement instaure la Purge. Pendant une nuit, tous les crimes sont permis et légaux. Les plus riches se calfeutrent dans les demeures hyper sécurisées et assistent aux évènements depuis leurs postes de télévision, ou sortent chasser. Les plus pauvres sont livrés à ce déferlement de violence, victimes ou bourreaux. A partir de là, le film pourrait partir dans plusieurs directions différentes. On imagine sans peine la peur diffuse à l’origine de cette idée, celle qui verrait les laissés pour compte d’une société de plus en plus inégalitaires déferler sur les classes les plus riches, reproduisant l’espace d’une nuit la Grande Révolution dont certains rêvent depuis des années. Le scénario prend un chemin différent en mettent en scène l’élite de la société sous la forme de chasseurs autorisés à concrétiser leurs plus bas instincts (se rapprochant de la thématique d’American Psycho de Bret Easton Ellis), de voisins envieux profitant de la Purge pour régler leurs comptes, ou de petits bourgeois se cloitrant égoïstement dans leur maison en attendant que la tempête passe.
C’est à travers une famille de ce type que nous allons suivre les évènements tragiques de cette longue nuit. Le père a fait fortune dans des systèmes de sécurité, la Purge est pour lui un moyen de se faire de l’argent autant qu’un mal nécessaire pour la stabilité du monde dans lequel il vit. Avec sa femme et ses deux enfants, il entend bien se cloitrer dans sa maison sécurisée et rester aveugle et sourd aux drames qui se déroulent à l’extérieur.
L’allégorie avec les classes favorisées qui vivent de plus en plus recluses dans des quartiers éloignées des citées pauvres, et donc par essence dangereuses, côtoyant sans le voir et encore moins le connaitre un monde parallèle fait de faits divers qu’ils ne voient qu’à travers le prisme des informations télévisées est évident. Le scénario portait en lui les germes d’un film social fort et dérangeant, encore eut il fallu qu’il y ait un John Carpenter derrière la caméra. C’est loin d’être le cas et le résultat s’en ressent douloureusement.
Illustrant de façon assez maladroite le thème du home invasion, American Nightmare accumule les maladresses. Première scorie, les personnages principaux sont mal caractérisés. Entre la mère sensée représenter la caution morale de la famille et dont la réticence devant ce système est à peine ébauchée, le fils geek à moitié autiste et la fille en pleine crise d’adolescence tardive, on a le plus grand mal à s’attacher aux personnages principaux. L’action ensuite est brouillonne, le moindre combat est filmé de façon illisible, la faute à une caméra virevoltante et un éclairage quasi inexistant. L’aspect social se réduit à l’apparition d’un SDF, noir de surcroit, pourchassé par de méchants gosses de riches en mal de sensations fortes. Enfin, les retournements de situations à répétition qui voient les personnages sauvés au dernier moment par l’apparition d’une tierce personne qui exécute l’agresseur d’une balle dans le dos finit par lasser et retire toute crédibilité à un scénario qui se délite au fil de l’histoire.
C’est dommage vu le potentiel de l’intrigue, et on ne peut que rêver de ce qu’aurait donné le film avec un réalisateur digne de ce nom derrière la caméra.

mercredi 24 juillet 2013

Pacific Rim


Lors du générique de fin, Guillermo del Toro rend hommage à Ray Harryhausen et Inoshiro Honda, deux figures incontournables du film de monstres. Et c’est bien cet amour des monstres de toute nature qui anime une fois de plus le réalisateur du Labyrinthe de Pan et des Hellboy. Peter Jackson avait fait sa déclaration d’amour au genre avec sa magnifique version de King Kong, c’est au tour de Guillermo del Toro de rendre hommage au cinéma d’animation avec Pacific Rim. Car ne nous y trompons pas, les vrais figures légendaires du film sont bien les Kaiju, ces monstres gigantesques surgit d’une autre dimension qui veulent coloniser notre planète. Les Jaegers, formidables machines de guerre conçues pour les combattre, ne sont que des coquilles vides et inopérantes sans les hommes et femmes qui les manipulent de l’intérieur. Et ce sont eux qui leur donnent leur personnalité. Le Jaeger russe reflète l’aspect massif de son couple de pilote, alors que le robot japonais à trois bras n’est qu’une extension des triplés qui le mène au combat. Et s’il n’est plus question du danger de l’arme atomique comme lors du premier Godzilla en 1954, le propos reste le même puisque c’est la pollution et le trou qui perce la couche d’ozone qui permettent aux Kaijus d’envisager de vivre sur Terre à notre place.
Evincé du plateau du Hobbit et délaissé, pour un temps, de son projet d’adaptation des Montains of Madness, le réalisateur se rattrape en mettant encore une fois en scène des monstres tentaculaires qui pourraient tout à fait sortir de l’imagination de H.P. Lovecraft.
Pacific Rim débute par un prologue qui résume en quelques minutes les premières attaques des Kaiju et l’apparition des Jaegers. Guillermo del Toro démontre une fois de plus son extraordinaire capacité à raconter des histoires en condensant de façon crédible ce qui aurait pu être un film à part entière. Et ce n’est que le début.
Pacific Rim enchaine les scènes de bravoure, chaque apparition des titans de chair ou d’acier étant filmée avec un sens aigu de la mise en scène. Il suffit d’un infime détail, un oiseau, un hélicoptère ou un paquebot utilisé comme gourdin, pour rendre compte sans en rajouter de la puissance et de l’immensité des combattants. Que ce soit sur terre, sous la mer ou dans les airs, chaque combat est parfaitement chorégraphié et doté d’un potentiel dramatique qui fait défaut à la plupart des films se situant sur le même créneau (voir à ce sujet la bataille finale de Man of Steel).
Pacific Rim pourrait se limiter à être un spectacle grandiose, mais ce serait mal connaitre le génial mexicain. Fidèle à lui-même, il n’oublie pas que les enjeux sont avant tout humains. Et l’histoire est construite autour d’une multitude de personnages et d’enjeux dramatiques qui font du film une réussite majeure. Alliant la forme au fond, le réalisateur fait encore une fois preuve d’un soin tout particulier apporté aux décors et à l’esthétique de son film. La scène du souvenir de Mako est ainsi traitée comme un conte de fées où la petite fille est poursuivie par un dragon de légende avant qu’un preux chevalier monté, non pas sur son destrier, mais sur son robot, ne vienne la sauver. Et cette petite chaussure rouge qu’elle ne lâche pas, c’est son cœur que son père adoptif lui rendra à la toute fin, lui permettant ainsi de se libérer d’une vengeance qui l’aliène. Le personnage de Mako est associé à une palette de couleurs froides qui reflète son état d’esprit, du moins jusqu’à la dernière scène, alors que Raleigh est environné de couleurs chaudes. Ce sont ces détails que nous percevons sans toujours parvenir à les expliquer qui nous entrainent dans une histoire qui aurait pu se contenter d’enchainer les lieux communs.
Alors certes, il y a bien quelques petits raccourcis (qu’est devenu le Jeager japonais à trosi bras et son équipage après l’attaque ?), Guillermo del Toro concède quelques passages obligés (le sacrifice des soldats, le jeune homme turbulent et effronté qui se rachète au dernier moment, la chute puis la renaissance du héros), mais on lui est reconnaissant de ne pas alourdir son propos plus qu’il ne le faut, par exemple en ne faisant qu’esquisser une histoire d’amour naissante qui aurait pu plomber le film.
Mélant humour, spectacle démesuré et humanité, Guillermo del Toro prouve une fois de plus que l’on peut faire des films à grand spectacle sans prendre les spectateurs pour des demeurés, et s’impose de plus en plus dans le panthéon des plus grands réalisateurs de films fantastiques.