Buried est un film sacrément gonflé car reposant sur un principe risqué : nous faire partager 90 minutes de l’existence d’un homme enterré vivant dans un cercueil.
Un seul acteur filmé en gros plan, avec une unité de lieu et une durée en temps réel, il fallait du cran pour oser en faire un film qui tienne la route.
Car Buried aurait très bien pu se contenter d’être un coup de bluff, de reposer sur un concept unique sans chercher à aller plus loin, bref de sacrifier au syndrome « Snakes on a plane » (par ailleurs totalement jouissif).
Mais en situant l’action en Irak, en faisant du seul protagoniste visible à l’écran un travailleur américain de la classe moyenne kidnappé par une organisation mafieuse qui réclame une rançon, Rodrigo Cortes ancre son film dans une toute autre réalité que celle du seul huit clos ultime.
Si le film débute de manière mystérieuse (qui est cet homme ? Pourquoi est il enfermé sous terre ?), appuyé en cela par des numéros de téléphone et des noms notés sur le bois du cercueil par Paul, comme autant de pièces d’un puzzle qu’il tente de reconstituer, il prend rapidement une toute autre direction.
Nous ne sommes pas dans un épisode de la Quatrième Dimension mais dans un contexte politico économique bien réel. Paul est enfermé parce qu’il est américain, non pas pour ce qu’il est mais pour ce qu’il représente. Les dialogues qu’il engage avec son ravisseur sont d’ailleurs assez clairs et mettent en évidence le fait qu’il symbolise à lui tout seul la politique américaine en Irak. Pas étonnant que Buried soit réalisé par un espagnol, on imagine difficilement un américain ayant un tel discours sur l’action de son pays.
Buried est donc un film engagé, même si ce n’est pas le propos principal du film. C’est aussi un sacré tour de force visuel. Car à aucun moment l’attention du spectateur ne faiblit et on reste scotché devant cet homme qui tente de survivre à l’aide d’un briquet et d’un téléphone portable, seul moyen de communication possible avec l’extérieur. Nous découvrons d’ailleurs en fonction des interlocuteurs qu’il appelle combien il peut être difficile de communiquer avec les gens et comment une mise en attente peut se révéler traumatisante.
Porté par une excellente interprétation de Ryan Reynolds et une réalisation parfaitement maitrisée et inventive de Rodrigo Cortes, Buried bénéficie aussi d’un très beau travail sur la lumière. Alors qu’il est plongé dans le noir le plus profond, Paul ne peut s’éclairer qu’à l’aide de son Zippo, d’une lampe torche, ou de son téléphone portable. En fonction de ce qu’il utilise, le film est baigné par une couleur jaune (la lampe, le briquet), rouge (la lampe avec filtre) ou bleu (le portable). Chaque séquence possède ainsi une identité propre qui nous permet de voir Paul sous un jour à chaque fois différent.
Le seul reproche que l’on pourrait faire un film serait de ne pas rendre assez compte de la claustrophobie que doit engendrer une telle situation. A plusieurs moments, la caméra prend de la hauteur pour nous montrer ce corps enfermé entre quatre planches comme si on l’observait d’en haut. On imagine mal le réalisateur filmant pendant des semaines un homme dans une vraie caisse en bois fermée de toute part mais de ce fait le film perd une partie de son capital anxiogène.
Film syndrome (parmi tant d’autres) de l’invasion américaine en Irak, tour de force en matière de mise en scène, d’éclairage et d’interprétation, Buried se termine sur une note noire et désespérée. On peut parier qu’un remake américain en 3D n’est pas prés de voir le jour !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire